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 et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi

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Saul Weiss
Saul Weiss
kill of the night


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MessageSujet: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyJeu 28 Jan - 21:52

Un moment qui dure plusieurs minutes, Saul piétine le seuil de la chambre. La porte est entrouverte et la lumière jaunâtre du palier fend le sol jusqu'au lit d'un rayon impudique. Il n'essaie plus d'entrer sans y être invité. Il s'imagine pourtant pousser sur la poignée et faire craquer le parquet en approchant de la table de chevet, et de la silhouette endormie de Sam. Les dents enfoncées dans la lèvre, Saul ravale ses sombres besoins égoïstes et tire sur le loquet, rendant la chambre à sa tranquille obscurité. A bas de la porte, il dépose, l'expression d'un vaincu plaqué sur le visage, moins d'une dizaine de fleurs. Il n'en connait pas l'espèce et ne sait d'ailleurs pas qu'on parle, en cette matière, de variétés ; il les a volées, et la coupe irrégulière de leur tige accuse son cran d'arrêt ; avec son désir de bien faire, il est satisfait des perles de rosée qui roulent encore sur les pétales. Entre les feuilles, il dépose le morceau de papier salement déchiré. Tout en haut est écrit : TU PRÉFÈRES QUELQUE CHOSE COMME ÇA ? En fouillant ses poches, il extirpe une petite boîte à l'état misérable. Son apparence dénigre l'objet qu'elle contient. Ce collier non plus n'est pas tout à fait honnête ; il vient d'un prêteur-sur-gages à quatre blocs de là ; c'est tout ce que Saul pouvait s'offrir dans les circonstances actuelles. Les phalanges ridiculement tremblantes, il le dépose à côté des fleurs, avec la vague conscience que ça lui demande beaucoup de courage, et d'imagination. Plus bas, sur le papier, il y a : NE ME DÉTESTE PAS. Chaque fois qu'il pense à cette horrible soirée, son cœur le démange à vouloir se tailler un chemin entre ses côtes et hors de sa poitrine. C'est signé SAUL.

Il s'est pointé au bar aux alentours de neuf heures. S'il a déserté la maison peu de temps avant l'aube, Saul a longuement traîné, les mains plaquées sur son volant et son esprit volant au-delà des horizons. Une légère crispation lui a bien murmuré de s'engager sur la voie rapide et de s'offrir un grand tour de la Louisiane, voir tout ce qu'il n'a jamais vu et découvrir ce qu'il n'a même jamais envisagé. Après une accélération déterminée, il a seulement suivi Alvar Street, s'est engagé sur France Road, avant de remonter le canal et de virer ers Gentilly par la route habituelle.

Il est un peu plus de neufs heures du matin lorsque Saul arrête la voiture devant le bouge qu'on appelle Harcourt Hall – la devanture n'affiche plus rien. C'est un repère à ivrognes et les têtes qui s'y noient dans l'alcool sont toujours les mêmes. Ils ont des prénoms, des métiers, et le barman connait aussi le prénom de leur femme et de leurs enfants. Ils prennent systématiquement la même chose et, la plupart du temps, ils sont trop ivres pour se battre. Ce commerce misérable existe depuis une éternité et, du temps de la Prohibition, il était quasiment huppé, veut la légende. En vérité, c'est un cloaque infesté de vermines, des rongeurs de l'arrière-cuisine aux soulards du comptoir. Avec son titre, Sham Weiss a hérité de ça. C'est un fardeau quand il faut y foutre les pieds, mais son sous-sol vaut bien qu'on s'y attarde. C'est en-dessous de cette taverne piteuse qu'il a organisés nombre de combats, et qu'il en a gagnés plusieurs. C'est aussi là qu'il s'est déjà fait latter la gueule, mais la maison gagne toujours. Les paris remboursent bien la dignité, et les frais de l'existence. Et voilà la raison de sa présence pour tout l'après-midi encore. Saul martèle la porte pour ne pas brusquer le réveil des fidèles de son établissement, puis il descend, les salutations expédiées, les escaliers sur la droite. Le béton nu pue encore le sang, la sueur, l'alcool et l'urine. Le fond de l'air est un vomitif. Il fait sauter le bouchon du bidon et arrose le tout de javel. Lorsqu'il tourne le robinet du jet d'eau, il est anesthésié par les vapeurs jusque dans sa mélancolie.
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Samira Foxx
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kill of the night


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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMar 9 Fév - 23:14

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMer 10 Fév - 1:09

Dans ce caveau, les heures défilent sans témoigner de l'avance du jour. A frotter comme un con, les genoux dans la flotte crasse et le nez dans les effluves acides, les mains s'esquintent. Mal diluée, la javel lui brûle les paumes, la jonction des phalanges, et les poignets. Puis ça le démange au coin des yeux parce qu'il s'éponge régulièrement le front. La plupart des flaques ne font pas de résistance. Et d'autres... Saul n'essaie pas de deviner le contenu exact de ce qu'il nettoie, ça le ferait gerber et il sait qu'il entame plus la dalle de béton, rivée aux fondations, qu'il n'efface de la déjection humaine. C'est le boulot des larges grilles d'évacuation, au creux desquelles il pousse tout ce qui peut être déplacé dans ce sous-sol. Quand il en finit avec le jet d'eau et qu'il s'y rince les mains pour la quatrième fois, Saul contemple le vide absolu. Six pylônes qui soutiennent la structure. Pas la moindre ouverture, en dehors de la porte et, lorsqu'on s'en éloigne de quelques pas, on ne distingue plus tout à fait le pan du reste. A une époque, on fabriquait de l'alcool ici et il s'agissait de pouvoir se débarrasser de tout ce qui roule, coule et se brise en moins d'une demi heure. C'est bien plus tard qu'un Sham a réaffecté tout l'espace : depuis, c'est une arène moderne.

Saul aime tous ses souvenirs d'ici. Avant qu'il n'arrive à la tête d'Harcourt Drive, il s'explosait les arcades, se vrillait les jointures et se fêlait les côtes avec des types - des gamins - dans son genre. C'était le jeu. Le rituel. Les plus vieux (qui n'étaient pas toujours des hommes eux-mêmes), éparpillés en cercle tout autour d'eux, encourageaient, gueulaient, pariaient. Il sait qu'ils ne valaient pas mieux que des chiens de combat mais, d'une certaine façon, ça leur canalisait l'horreur, ça purgeait leur violence et ça tournait le meilleur de leurs instincts au profit du quartier. Les grands devaient avoir compris ça, pensait-il. Par la suite, et les années aidant, Saul a su à son tour : c'était simplement bon. Aussi stupide que ce soit à admettre, c'est ce plaisir diffus, malsain, que Saul aime dans tous ses souvenirs d'ici. Et c'est difficile à admettre. Sinon, pourquoi n'en a-t-il jamais parlé à Samira ?

Ester non plus n'en sait rien. Pourtant, ça lui fout un coup au moral de devoir s'avouer à Sam en premier. Saul est un peu surpris, et il cherche le chauffeur qui a pu l'amener ici. Peut-être qu'il le voulait. Peut-être qu'il était prêt. Peut-être que ces fleurs, ce collier et ce mot, ce n'était qu'une invitation. Malgré tout, et selon le sens commun qui sied même aux idiots, l'étage aurait été plus adapté. A présent qu'elle est là, et que les mots s'échappent d'entre ses lèvres pour le captiver, Saul n'a plus le choix de chercher Lowell et de le frapper avec assez de violence pour lui faire regretter le jour de sa naissance ou craindre pour son avenir. Il se plante connement devant elle, le tuyau à la main, et les cinq autres doigts qui ne savent plus bien s'ils veulent s'essorer au t-shirt ou disparaître dans sa poche. « T'es venue, sourit-il tout doucement. » Il est brûlé par un feu intérieur qui dissipe l'essentiel de l'univers. Le collier orne merveilleusement la gorge, ou la gorge le collier. Allez savoir, il est trop primitif pour en juger. Et, après un effort de concentration pour se combattre le ravissement, Saul n'y affecte qu'une brève attention. Le sourire se prononce, puis il s'installe franchement. Il mesure le courage qu'il faut à Samira pour se pencher à une fenêtre ou se tenir devant la porte. Aussi loin qu'il regarde, il ne décompte pas le courage qu'il a fallu à la jeune femme pour venir jusqu'à lui. En revanche, il savoure cette offrande avec un puissant appétit. Il ne néglige pas de s'y attarder, d'en frôler la constance, la substance, et d'en admirer les effets sur lui. Au surplus de tout le reste, Saul se sent libéré d'un poids, qui l'acculait à chaque jour de silence. Alors il ne ferait rien pour lézarder cette sensation et il balaie les lieux avec un revers de main : « C'est rien, il ment sans y songer. » Saul a le regard fiché à celui de Samira. Il se retient de parler. Il se retient de dire merci lorsqu'elle le dit. Il va s'excuser si les fleurs ne sont pas ses préférées. Il va promettre que le collier peut être changé. A quelques secondes mentales près, Saul jurerait presque de se rendre l'écriture plus lisible. Heureusement, certain de tout faire foirer s'il débite une syllabe, il presse les lèvres et se mange le sourire.  

« Je t'aime, Saul Weiss, Sam dit après un moment qui aurait paru excessif à une patience extérieure. Tu dois déjà le savoir, non ? » « J'en savais rien, il badine tandis que le rictus mue d'une joie prudente à une malice canaille. Je me le répétais peut-être... des fois que ça t'aurait obligée. Ça a marché, alors ? » Savoir qu'elle est là, qu'elle le regarde et, surtout, qu'elle ne le déteste pas lui réchauffe la poitrine et le ventre. Le pire est que l'impromptu de la situation ne le frappe toujours pas. Ce qu'il dévore de ses prunelles dilatées, et séduites, c'est Samira et seulement elle. Elle est piquée devant lui, dans ce sous-sol immonde, et ils s'affrontent d'un amour indécent pour la distance ridiculement géante qui les sépare encore. Ce n'est qu'à l'insoutenable de son besoin de mordre à cette bouche que Saul secoue ses cheveux en sueur et son esprit épris. Le malaise lui capte l'âme. « Je suis dégueulasse, excuse-moi. » Rien qu'un petit laps de temps, il s'attarde. Est-ce qu'on peut déserter un tel moment ? Est-ce qu'il a le droit de l'abandonner, même pour quelques secondes, sans tout gâcher ? Les livres, les films et l'internet ont cette réponse. Mais pas Saul Weiss, qui se traine, une vague d'angoisse nouvelle dans les entrailles, jusqu'au robinet. Il se frotte mieux les mains. Elles sont rouges et sèches. Elles lui sont douloureuses, mais moins que de s'éterniser si loin de Samira. Alors il s'arrose rapidement le visage, frictionne encore ses paumes et se remonte les manches à la moitié des avants-bras. S'il se sent toujours si misérable et si crasseux, il rapplique pourtant dans le coin qu'elle occupe. A l'index, il flatte le collier et son sourire se ranime. « Tu dois déjà le savoir, souffle-t-il maintenant qu'ils sont si proches, mais je t'aime aussi. Et j'ai pas les mots pour dire comme je suis désolé. » Là, il se penche sur elle et dépose un baiser d'égoïste. Les billes rivées à celles de Samira, à présent, il l'embrasse. Ça dure aussi longtemps qu'on cherche à graver un souvenir profondément, et justement, dans une mémoire. Saul ne s'évade que lorsqu'il sait qu'il peut réciter les nuances, les odeurs et les sons. Il ne l'accepte qu'à la condition de découvrir, encore, toujours, Samira sous le feu d'un regard réciproque. A même les lèvres, il inspire. « On devrait monter. Et je dois me changer. » A l'idée de quitter ses vêtements, et en dépits de la répugnance qu'il éprouve pour lui-même, ça suffit à ce qu'il lui pille un autre baiser.
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyDim 14 Fév - 21:20

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMar 23 Fév - 15:18

Ils s'occupent à demander pardon. Les fleurs, le collier et la lettre font les préliminaires des mots, et les mots des baisers. Manipulant une chose très fragile, et en cela très précieuse, elle les arrête sur le seuil. Il ne dit rien pour ne rien brusquer, aussi parce qu'elle raconte des choses qu'il veut entendre. Saul, il les écoute toutes, il goûte chacune, malade du silence qu'il a dû endurer, et il les rend avec religion et reconnaissance. Sagement, il obéit à l'éloquence inhabituelle de Sam, à son immobilisme et finalement à son étreinte. S'il prend tout, docile comme le sont les chiens, c'est qu'il assiste à un spectacle glorieux ; elle ne lui en veut plus ; il ne lui en veut de rien. Ils ont le corps serré, pressé, et la chaleur qui émane d'elle, de ses mains, l'investit doucement dans la gorge, et le ventre, et les reins. Derrière la prudence des caresses, il y a la frénésie des êtres et la proximité qu'elle leur fabrique expire quelque chose de dangereux, et surtout d'imminent. Samira fait tout cela. Pendant que sa bouche s'invente un âge, ses mains en disent un autre. Alors, soudain, des termes comme excitant, dégueulasse et nu font l'effet d'une déflagration. Saul n'est plus un adolescent, mais il découvre très récemment la puissance que certains mots, dans certaines bouches, font à certains. Quand Sam les soupire contre lui, quand Sam l'embrasse, quand Sam l'enlace avec tellement de force que c'est d'envie qu'elle l'étrangle, Saul se redécouvre, lui et l'instinct qui niche, implose et se répand. Il n'a pas l'âme à la conversation, il se fiche des excuses et, surtout, il veut plus fort des battements de son cœur, qui pulse le sang jusqu'aux extrémités de son corps. « J'allais dire, fait-il après qu'elle ait épuisé les syllabes, dit-il comme on attend qu'un enfant finisse son caprice, que tu devrais enlever tes vêtements. » Le rictus qu'on voudrait imaginer, malicieux et fendu sur la lèvre, n'éclôt pas. Enfoncé dans une tension si appliquée, si sérieuse, il étudie Samira sous des angles qui n'exigent pas qu'il se déplace : il devine la veine saillante, la clavicule qui disparaît sous le tissu et l'indécence que tous les carrés de peau nue esquissent. Négligemment, il cherche, il cavale mentalement après l'instant, la seconde d'inattention, où tout va exploser et les mettre à genoux, les paumes en sang, à s'accuser l'un l'autre. Si ça ne se produit pas, cela va se produire. Saul Weiss guette le signe, l'inflexion de voix, ses propres gestes. Puis il dit : « Pas ici. » Harcourt Hall n'abrite aucun endroit correct, mais ce sous-sol est le pire. Alors il attrape la main de Samira dans la sienne, et il l'entraîne derrière la porte. Les ivrognes les saluent comme s'ils ne les avaient pas déjà croisé ; le juif n'a presque aucune considération pour ce cérémonial soûlard, à l'exception notable d'une allure accentuée lorsque les pupilles glissent sur Samira. Cliché de lui-même, il passe d'un côté de la jeune femme à l'autre, simulant une escorte inutile. Pas le moindre de ces types n'a quitté son comptoir, et ils font les yeux doux au fond de leur verre qu'ils voient assez nettement pour jurer qu'il est vide. Ils sont aussitôt hors de la salle principale, dans un couloir flanqué de trois portes : en face, une sortie donne sur la cour et le terrain de livraison, tandis que les deux autres mènent successivement au stockage et à un bureau. C'est là que Saul entraîne Samira, sachant que le petit réduit ne sert plus guère que d'infirmerie misérable. Une table fait office de lit et, à cet effet, elle est couverte d'un matelas défoncé, élimé, et maculé de tant et tant d'auréoles que le sous-sol reluit. Par-dessus, un petit paquet de couvertures s'accumule au milieu de bandages, pilules sans boite et flasques sans étiquette. Comme s'il était vraiment question d'y recevoir quelqu'un, Saul ramasse une partie du bordel, qu'il fourre dans les armoires métalliques à sa gauche. Du pied, il pousse d'autres déchets et foulent d'autres tissus. La plupart finit sous la table, sous une chaise ou un tabouret, quand ça n'est pas simplement rabattu contre un pan de mur ou un autre afin de dégager assez de parquet pour y marcher. Quand il finit ce qui ne refait définitivement pas le portrait de la pièce, il se tourne vers Sam, un mouvement dans les épaules qui dit son abattement soudain. Résolu à ne plus se disperser en excuses (encore qu'il ait été moins prolixe qu'elle), il ébauche un sourire timide. « Ce n'est pas exactement un endroit fait pour les filles. » Même quand c'est lui qui le dit, ça ne veut pas dire grand-chose. Qu'elle mérite mieux, peut-être. Qu'il n'a que ça à proposer, aussi piteux que ce soit. Reste qu'il abandonne un soupir chargé de confusion, une aigreur inconnue dans le fond de la gorge. Les iris fixes sur Samira, il accuse une modération qui ne lui ressemble pas. Il ne sait pas bien ce qu'il espère.  Il ne sait pas bien ce qu'il veut. Ou alors il le sait, et il le sait très bien. Ses mains le savent, sa bouche le sait, et son cœur ne l'ignore pas. Le sang lui grogne dans les tempes, étouffées de nervosité et d'impatience mêlées, et il sent d'abord le baiser que ses lèvres prennent à celles de Samira avant de le voir. Et lorsque la découverte lui avive la vue, il recommence avec un peu plus de fureur, cherchant dans le revers des vêtements où introduire ses mains. « Enlève tes vêtements, maintenant... » Le souffle ne suffit pas, les doigts aident.
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMer 24 Fév - 14:38

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyJeu 25 Fév - 14:51

Les mains de Saul sont trop pressées. S'il n'y prenait pas garde, elles feraient mal à fouiller le vêtement sans dévoiler la peau. La retenue s'effrite quand elle se débarrasse la gorge, la poitrine et les flancs, et il déploie de son imagination pour écarter ses propres gestes et atténuer sa volonté. Parce qu'il doit départager la brutalité de ses désirs des besoins de Samira, il va contre ce qu'il est. On n'a pas habitué Saul Weiss à promener ses phalanges, à visiter un corps du ventre jusqu'à la bouche, pour qu'on, finalement, les embrasse. Patient au point que ça fasse une qualité, il la regarde faire avec curiosité, un tremblement qui court du poignet à l'épaule, de l'épaule jusqu'au cœur. Ce n'est pas la première fois et, cependant, il n'a pas l'habitude. Faut-il qu'il la protège ? Ou faut-il qu'il l'assaille ? Il n'a pas le courage de décider, et surtout de se tromper, alors il enveloppe la nuque de sa paume et il rend à la tempe ce que la bouche donne à son cou. Les doigts de Sam le parcourent, il n'a qu'à leur obéir. Ça n'exige pas qu'il réfléchisse, qu'il panique, qu'il regrette, et toutes ces considérations qu'on a injectées dans son être quand il en a le moins besoin. Ça n'est pas le moment de se découvrir une conscience et encore moins une âme. Il ne veut plus s'excuser, ni discuter. Saul ne sait pas faire ça. Le reste, il le réapprend de la main de Samira qui lui exaspère la braguette.

Il râle après elle et, répliquant, Samira lui tourne le dos. L'index qui compte les vertèbres découvertes, Saul pousse sur la colonne quand il presse son bassin contre les fesses. Les tissus frottent et froissent leur impatience. Pourvu qu'elle continue, qu'elle courbe et qu'elle appuie, et il oubliera tout. Il s'oubliera, lui. Le désir aussi insoutenable qu'un hoquet prend la gorge, il retire son t-shirt, le roule en boule et le jette sans savoir où. Du pouce, il fait sauter la boucle de sa ceinture et il rattrape Samira pour que sa poitrine pèse sur son torse. De sentir la pointe de ses seins, l'imprudence de ses doigts, la vanité de ses mots, Saul mord ces lèvres qui parlent trop. Il voudrait qu'elle se taise, et qu'elle n'ait rien à la bouche que la sienne. Saul, il l'embrasse pour le bonheur du silence, des corps qui se heurtent, des mains qui se cherchent, qui se trouvent, et des muscles qui se tendent. Il aime entendre le frottement de son jean sur ses cuisses, l'air frais qui s'insinue et lui lèche l'épiderme, la main qui l'emprisonne et les lippes qui l'enveloppent. Le souffle contenu, il a d'abord un regard furtif pour le spectacle de Sam agenouillée. Il n'a pas de pudeur déplacée, il finit par la dévorer des yeux, les pupilles dilatées par la fureur qu'elle souffle en lui. Au plaisir d'être aimé à la langue s'ajoute la vue de son sexe avalé par la bouche. Avec une application qui ferait plier un être insensible, Samira le soulage de son angoisse, de son hésitation et de ses scrupules. Ça n'est pas une baise d'arrière-salle. Sam, ça n'est pas la fille que l'on prend contre un mur pour la relâcher sur un trottoir. Sam, s'il l'attrape, s'il l'embrasse avec ardeur et s'ils se défont de leurs derniers vêtements dans ce bureau misérable d'un bar tout aussi pathétique, c'est que l'amour n'empêche pas le désir. Ce désir est égoïste, un peu brutal ; surtout, il est avide ; pourtant, il naît au moins autant des sentiments qu'ils se vouent que du bonheur qu'elle lui fait à la bouche, des yeux qu'elles rivent aux siens, d'une tension inexplicable qu'un instinct mutuel se promet. Le galbe et le poids de ses seins le valent bien. La courbe de sa gorge. Les ombres de ses cuisses. Le chemin d'ambre qui va du nombril jusqu'à l'aine. Il ne connait que des raisons de se précipiter. Alors Saul la soulève et lui pousse le dos contre la porte. Il mord le coin des lèvres, il embrasse le cou, il grignote la clavicule puis l'épaule et, tout ce temps, ses doigts frayent entre les cuisses et la caressent. Non, ils provoquent. Ils agacent, exaspèrent. Ils se font le passage humide du premier sursaut de ses reins. Pendant qu'il grogne un baiser, ses mains enserrent mieux les fesses, puis il abdique. Entré avec prudence, il en veut davantage. Plus vite. Plus fort. Et plus profond. Sam est une fille que l'on prend contre une porte, avec l'espoir secret que ça ne s'arrête jamais.
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyVen 26 Fév - 10:15

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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyVen 26 Fév - 15:34

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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptySam 27 Fév - 0:04

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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptySam 5 Mar - 13:06

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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyDim 6 Mar - 20:28

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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyLun 7 Mar - 15:56

C'est sa seconde d'inattention. Lorsqu'elle refuse de se plier à l'exigence en lettres de silence, Saul sait qu'ils mettent le doigt sur le moment où tout explose. Gentiment, il referme les phalanges autour des poignets qui l'attaquent, puis il accompagne le mouvement qui aime mieux le ceinturer. Il ne manque rien qu'une étincelle ; une intonation abrupte, l'ordre réitéré ou la vérité toute nue suffirait. Aussi tous les baisers qu'elle pique à ses lèvres lui font-ils mal au cœur – ils sentent le point de rupture, quand on ne peut rien faire que se péter les dents contre le bitume. S'il l'oblige à partir, c'est foutu. La chaleur de Sam contre la sienne, et dans la sienne, Saul ne veut pas qu'elle parte. Néanmoins, si elle reste... La perspective d'échanger une catastrophe contre un cataclysme lui donne envie d'abandonner. Quoi que plus lâche, ce serait plus aussi plus simple de tout avouer et de la laisser juge de combien elle le hait pour tout ce qu'elle pense aimer. Pourtant, ça semble déjà trop courageux, et le mirage du sous-sol lui fait l'effet d'un sale cauchemar cinglant. Alors il puise au regard qui l'accroche le stratagème le plus sensé : « D'accord. » Samira est une enfant à laquelle on cède. En vérité, elle tient son besoin et son envie dans le creux de sa paume. Elle peut presser son âme entre l'index et le pouce. Elle peut le briser si elle se mettait à le détester tout de suite. Sur le malheur, il gagne du temps. Encore fébrile, le cœur vibrant, et ce bassin qu'elle ne cesse pousser du sien, Saul décide de rejeter l'inévitable. Il fait semblant, et il s'écarte comme on tente d'établir une distance solennelle alors qu'une bosse lui déforme toujours le jean : « Mais tu dois promettre de faire ce que je dis. Et... » Il y a un millier de recommandations qu'il aimerait faire avant de déserter l'infirmerie-bureau. Incapable d'en dresser une liste exhaustive, il plisse le regard, cherche les détours qu'elle pourrait déjà emprunter, puis il décrète intérieurement que tout tient volontiers dans : « Fais ce que je dis. » L'air décidé, Saul embrasse le coin de la bouche et il se sépare franchement de Samira. A Harcourt Hall, il n'est pas Saul. Samira n'est personne. Et, d'ailleurs, tout le monde se fiche de comment son voisin s'appelle pourvu qu'on ait le droit de lui éclater le nez pour une brassée de dollars. Avant d'ouvrir la porte, il ramasse les couvertures étalées et les jette ailleurs, comme si des types n'avaient pas d'abord saigné là où ils ont ensuite baisé.

« C'est Clive. » La main qui hésite encore entre les fesses et les reins, Saul pousse Samira derrière le comptoir. A la façon dont il bascule la planche qui ferme l'enclave de bois, c'est comme s'il dressait toute une forteresse autour d'elle – pour la protéger ou pour la retenir. Là, il pose les coudes en se frottant la tempe. « Il... gère cet endroit la plupart du temps. » « Tout le temps, rectifie l'intéressé. » Alors qu'il surplombe Sam d'une tête et qu'il est taillé dans le muscle, Clive a le ton égal et il ne donne jamais le sentiment de s'adresser à eux. De toute façon, Saul ne lui accorde aucune attention non plus, d'autant que le barman s'occupe à remplir compulsivement les verres qu'on ne cesse de vider. Ce type a une histoire intéressante. Et, d'un âge comparable, tous les deux ont beaucoup de souvenirs communs, ici. Ils agissent néanmoins comme s'ils se connaissaient à peine. Comme s'ils se haïssaient assez. « Sers-lui un verre. » Sans s'assurer qu'il a été entendu, Saul poursuit pour Sam : « Je vais chercher Lowell et je reviens. Sois sage, il dit lentement. Sam. » Quand Saul attrape la main de la jeune femme, Clive raye un verre sur le comptoir jusqu'à elle. Il les abandonne sans un mot. « Tu as promis de faire ce que je dis, lui rappelle-t-il d'un timbre paternel. C'est pas un endroit pour les filles, alors sois sage. » Une seconde, il se tend comme pour déposer un baiser sur son front. Une oeillade sur le côté le fait renoncer. Sa main presse celle de Sam une dernière fois avant qu'il ne prenne la porte du sous-sol.

« Elle peut pas être là ce soir ! » Les semelles croisées sur la table, Lowell glisse la liasse de billets dans un élastique avant de la balancer dans une boite en carton. Sous l'oeil agacé, et cependant trop froid de Saul, il finit par se rasseoir et se sonde rapidement la montre. « Ça nous laisse deux heures, il remarque. » « Pourquoi tu l'as amenée ici ? lâche le protecteur d'Harcourt comme s'il attendait que n'importe quel son sorte de cette bouche pour pouvoir asséner la question. » « Elle voulait venir, dit l'autre sur la défensive. » « Je m'en fous ! » « Sham... » Il est appelé et il frappe aussitôt dans le pied branlant de la table. Tout le métal sommaire vibre et proteste, menace de s'effondrer. « Tu n'as qu'à pas combattre ce soir, objecte Lowell qui s'est redressé. » C'est la solution la plus raisonnable, et Saul l'a évidemment envisagée. Néanmoins, ça attaque le monstre qui s'est lentement éveillé toute la journée durant. Il se sent libre, ou plutôt sur le point d'être libéré. Ses jointures le démangent rien que d'imaginer, et il a le ventre plein d'un fourmillement qui confine au plaisir. « On a assez de gars pour ce soir. Ce con de Clive fait la compta. Je ramasse en fin de soirée. » Lowell hausse les épaules comme s'il s'agissait d'une idée jetée en l'air. Il voudrait que Sham Weiss adhère à cette option et la reprenne pour lui. Il sait aussi que ça ne sera pas le cas. « Il faudra bien qu'elles le sachent un jour, soupire le nipper après un moment de silence buté de son leader. Si elles restent, elles finiront par le savoir. »

Clive observe dix minutes de service zélé, pendant lequel il ne regarde jamais Samira. Il sait qui elle est, ou plutôt ce qu'elle est. Comme la plupart des habitants d'Harcourt Drive, il n'aime pas ça, mais ce que le Sham veut, Dieu veut. « Te panique pas, il dit avec une pointe de sarcasme. Il va remonter. » La jeune femme ne montre aucun signe de nervosité et, en vérité, il est un peu surpris de cette aisance avec laquelle elle demeure là, au beau milieu d'un tas d'ivrognes immondes, dans un cloaque tout aussi crade. Clive a entendu ce que Saul lui a dit et ce n'est pas seulement un endroit qui n'est pas pour les filles : c'est un endroit interdit à ce qui est beau, et bon, et bien. « T'es seulement venue pour la baise d'encouragement pré-combat ou tu sais remplir des verres aussi ? » Sans dénoter de moquerie ou d'amusement particulier, Clive fait claquer deux culs de bouteille sur le comptoir et il désigne le type en face de Sam avant de se détourner d'eux.
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMar 8 Mar - 0:02

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMar 8 Mar - 1:57

« Et à Ester ? Tu l'as même pas dit à Ester ? » A la craie, Lowell trace sur le béton. Tous les mètres, il s'arrête, se masse les reins comme s'il n'avait pas vingt ans et jette un œil à son primo, qui ne dit plus rien. Avec ses sales humeurs rentrées, il est impénétrable, et donc imprévisible. Lowell n'aime pas ça. « Ester aimerait cet endroit, commente le nipper. » S'il estime que la provocation est honorable, et qu'elle mérite bien qu'on réplique, l'autre ne lâche toujours rien, le cul sur sa chaise, les avant-bras sur le dossier. De ce coin du sous-sol, Sham Weiss a l'air de parcourir le petit cahier du regard. Là-dedans figurent les noms de vingt types. La moitié provient d'Harcourt Drive. Le reste est un ramassis de fous furieux en provenance exclusive de Gentilly. On ne se bat pas avec ceux qui ne respectent pas la loi sacrée de l'anti-flics. Et on ne peut pas se battre non plus avec ceux qu'on veut vraiment tuer. La vérité, c'est que ces vingt types se connaissent, qu'ils ont sûrement grandi ensemble ou fréquenté la même école. Lowell s'est déjà battu avec Saul, quand ce n'était que Saul. « Personne n'a jamais dit que les filles pouvaient pas se battre au Hall... » « Finis ce putain de cercle ! » Saul n'a rien bougé que ses lèvres et il maitrise prodigieusement les traits de colère dans sa voix. C'est à peu près pire que s'il exprimait franchement sa colère. Alors le cercle de craie finit de prendre forme dans un silence stérile. Avec cinq mètres de rayon, il n'y aura jamais plus de trois combattants à la fois. Ce sera calme. De la routine. Sans compter qu'une vingtaine de nippers arriveront bientôt, pour cerner le périmètre, juguler les allers et venues et prévenir des sirènes ou des autres menaces. C'est l'équivalent d'un vendredi soir perdu devant sa télévision. C'est facile. Lowell jette le morceau de craie dans le carton et lit par-dessus l'épaule de Saul l'agencement de lettres et de symboles qui forment le code rudimentaire à l'épreuve des non-inités. « T'as qu'à mettre le nom de Sam là, plaque-t-il le doigt sur le dernier interligne. » « Tu me fais chier. » Saul claque le cahier et le fourre dans la poche de son jean. Il est déjà à l'escalier. « Propose à Sam de descendre ce soir ! lance Lowell en riant. Tu serais un avant-gardiste ! Sham Weiss fait descendre les gonzesses dans l'Arène, dit-il comme on présente un titre, en grand, au bas d'une affiche totalement fictive. Soit tu révolutionnes l'affaire... soit tu tiens un concept de porno. »

Un léger rictus flotte sur les lèvres de Saul lorsqu'il émerge du sous-sol. La balafre disparaît sitôt qu'il rencontre l'attention oblique de Clive. Le barman affiche une expression légèrement différente ; sans qu'il ait exactement changé d'humeur, on aurait dit qu'il le cherchait. S'il a raison de suspecter quelque chose, Saul n'a pas l'occasion de pousser l'inspection plus avant. Sous le choc, il encadre Samira de ses mains, sans toutefois la toucher. Elle disparaît comme s'il avait tenté de la frapper, physiquement ou moralement, et lui reste planté là une seconde trop longue pour ne pas être remarquée. Les sourcils creusés, il prend le temps d'approcher. Il y a encore une minute, il venait se confesser. Contrairement aux espoirs de Lowell, il ne laisserait jamais des femmes se battre, fussent-elles de la trempe d'Ester. Néanmoins, Sam mérite de savoir. Elles méritent toutes les deux de savoir. Et puis il n'a pas le choix. C'est douloureux, souvent, d'apprendre ce qu'ils sont vraiment. Mais elle est là, et il ignore comment la faire partir. « Quoi ? » Le premier réflexe de Saul, c'est de trouver le regard appuyé de Clive. « Qu'est-ce qu'il t'a dit ? » Il ne murmure pas. En tous les cas, son ton est au-dessus de celui de Sam. Moins furieux que surpris, il ravale les autres syllabes qui se pressent à ses lèvres. Comment le sait-elle ? Sans être stupide, Samira ne sait simplement rien d'Harcourt Hall. Ni de lui. Et, finalement, il préfère cette idée. Alors, d'abord, il va dire que non, et tout nier devant l'évidence. Puis ça semble futile de mentir.  Parce que Samira ne sous-entend rien, elle le confronte. Et parce que Clive lui concède trop d'attention pour que ça ne soit pas un conseil. « Je... » Dans les mots de Sam, Saul ne sait pas ce qu'elle sent. Est-ce qu'elle est en colère après lui ? Parce qu'il fait ce qu'il fait ? Parce qu'il n'en a rien dit ? Est-ce qu'elle lui en veut ? Est-ce qu'elle est déçue ? Ou bien est-ce qu'elle le hait ? Selon la réponse, il voudrait changer ses options. Sa stratégie n'y peut plus rien, et la voix de Lowell lui revient en ressac : « C'était pas le bon moment, avoue-t-il sans s'avouer. » Bien qu'il y réfléchisse avec l'adrénaline de sa crainte, Saul ne se trouve pas d'instant propice à expliquer les pans les plus obscurs de son existence. Son attitude voudrait dire de la honte et, pourtant, il assume. Ce qu'il redoute, c'est la réaction de Samira, ce qu'il perdra quand elle réalisera exactement ce qu'il fout dans ce sous-sol. Peut-être que ça ne lui fait rien. A force de s'esquinter contre les billes qui lui font l'espace nécessaire à sa confession, il ne saurait dire quel sentiment la domine. Il est tout aussi incapable de sa propre introspection, sinon que les effluves de la hargne gagnent sur lui. « J'allais te le dire. » Saul gagne quelques secondes. C'est inutile parce qu'il est surtout dérangé par les oreilles qui trainent, et les yeux qui s'attardent. Ce genre de conversation n'a pas sa place ici. D'une façon générale, Saul n'a pas ce genre de conversation. « Viens. » Il extrait Samira au moment où la porte grince dans son cadre. Peu importe qui entre, ils sortent par la porte de derrière. « Ça fait partie de ce que je dois faire pour Harcourt, il lâche dès que le battant claque derrière eux. » Au débit de mots, ça sent le désespoir, les excuses et rien qu'une nuance de rage. « Avec cet argent, on fait vivre le bloc. On a reconstruit des maisons, après Katrina. C'est comme ça que ça marche, depuis toujours. Ça fait vivre le bloc, il répète. Et ça me fait du bien. Je suis désolé, d'accord ? Mais ça me fait du bien. »
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMer 9 Mar - 22:04

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyJeu 10 Mar - 0:46

Aussi longtemps qu'il monologue, et même si le souffle manque, elle ne peut rien lui dire. Aussi longtemps qu'il débite sa tirade, Sam est forcée de l'écouter en se vissant les lèvres dans une moue qu'il s'abstient de découvrir. Saul s'accroche férocement à cette pensée quand les syllabes s'enchainent sans qu'il parvienne à les articuler. Il voudrait déglutir mille choses, toutes en même temps, et voir ce qu'elle ferait de ce foutoir une fois libéré dans le silence de la cour. Saul se cramponne à sa manœuvre, presse les mâchoires, espérant sincèrement que s'il l'inonde assez d'idées confuses, de protestations véhémentes et de justifications doucereusement hargneuses, elle ne trouvera jamais quoi lui répondre. Et il s'esquinte si vite, et il échoue si lamentablement, qu'il se fige, sidéré, par son propre abandon. Au bout d'une diatribe qui court moins d'une minute, il s'interrompt parce que le réservoir de ses explications sonne creux. Il n'y a rien, ou alors rien qu'il sache, qui puisse justifier... quoi, exactement ? C'est peut-être ça, en vérité : de quoi devrait-il s'excuser ? Et pourquoi se sentir coupable ? Et pendant que l'indignation crépite, s'éveille, la bonne question, qui lui flotte au-dessus de la conscience, est de savoir pourquoi c'est le cas. Oui, il se sent coupable et, sans mettre de nom sur son crime, il ne veut pas voir l'éclat de déception, ou de Dieu sait quoi d'autre, qui va lui prendre Sam. Saul, il n'a jamais eu personne à décevoir et, tout à coup, il lui semble que son essence toute entière lui fait honte et que, surtout, ce qu'il est pourrait lui coûter ce qu'il a. Alors il tremble, les poings serrés, ou dans le dos ou contre la cuisse, avec cette ferveur dans le fond de l'âme qui lui assure que c'est foutu. Même lorsqu'elle lui assure qu'il n'a pas besoin d'être désolé, il l'est résolument. Même davantage. Si elle est incapable de le blâmer, alors elle vaut encore mieux que ce qu'il croit. De facto, ça fait décroitre sa propre valeur et, à son estime pitoyable, s'ajoute une dépréciation malvenue. Il piétine le sol, rangeant son malaise dans les endroits fictifs qu'il trouve. Enfin, quand la colère ne l'emporte plus, il assiste aux instants qu'il déteste le plus : avoir cette conversation. Clive ricane dans son tympan gauche. Lowell murmure un je te l'avais bien dit dans le droit. Et Saul est tout près de leur céder mentalement des insultes pendant que, ses billes obstinément fixées sur Samira, il est blessé de constater qu'elle ne le regarde toujours pas. « Je voulais te le dire, il objecte faiblement. » Cet essai-là non plus n'est pas très convaincant. Elle embrasse toujours le dallage des yeux, et il reste planté devant elle comme le dernier des cons. L'option la plus tentante, c'est encore d'avoir un coup de sang, et de déguerpir, noyé dans sa rage. C'est aussi la plus radicale. Et elle est lâche, en plus. Il l'écarte aussitôt. L'alternative consiste à plaider coupable, à lui raconter, par le menu ou dans le détail, les affectations peu communes d'Harcourt Hall et espérer que cet exposé pédagogique puisse effacer son mutisme. Ça paraît trop facile et, d'ailleurs, Samira ne témoigne aucun intérêt aux combats en eux-mêmes. A cette perspective, Saul retrouve des inspirations plus fluides. C'est aussi fugace que le coup de lame qu'il reçoit dans le thorax quand elle lève les pupilles vers lui. Contrairement à ce qu'elle croit, ce qu'a dit Clive est loin d'être anodin. Tout le monde sait que Sam ne sait rien. Et ça n'est pas pour la protéger elle. Brièvement, il aimerait voir combattre, ce soir, ce sale type derrière son comptoir... Et elle revient à lui, ses paumes contre sa peau, et elle frotte l'amour complexe qu'il lui porte. Les billes rivées les unes aux autres, et les corps retournés l'un contre l'autre, elle ne veut finalement peut-être pas l'entendre. Si elle brise aussi aisément le mécanisme qui consiste à le faire avouer, à lui déverrouiller les sentiments et les mots savants pour bien les décrire, c'est qu'elle ne tient pas à savoir. Alors, et même si ça n'a rien à voir avec son monde, avec ce qu'il voudrait garder pour lui, Saul hoche doucement du crâne. Il ne va pas lui expliquer, que ce n'est pas ça, que c'est tellement plus simple et tellement plus vital. « Je ne veux pas que tu rentres, il dit en l'enlaçant, un baiser posé à son front. » Il n'a rien dit, d'Harcourt Hall, de ce soir ; il a repoussé l'échéance, et aboli le moment ; il s'est conduit comme un lâche, a nié l'évidence alors que la révélation se précipitait sur eux ; Saul n'a rien dit, et ne dit rien, pour ne pas avoir à démontrer ce qui le rend moins digne d'être aimé par cette fille qu'il embrasse à pleine bouche. « Reste avec moi. » Il ne l'entraine pas tout de suite à l'intérieur du bar. Alors que le jour décline rapidement, Saul la garde contre lui, se berçant plus qu'il ne l'apaise.

« Les gars se battent à un contre un, sauf s'ils décident de faire une mêlée à trois, quatre, cinq... mais c'est pas le cas ce soir. » En tirant le téléphone de sa poche, Saul scrute l'heure en même temps qu'il marche au côté de Samira et qu'il lui abandonne les clés de compréhension d'usage. « On tue pas. On va pas à l'hosto. Et s'il arrive un truc, tout le fric de la soirée va à la famille. » Ils sont bientôt revenus dans la salle principale, qui grouille d'un bruit compact et de silhouettes mal dessinées. Avant de quitter le couloir, il se fiche devant elle. « On peut parier sur soi – c'est même recommandé. Sauf moi, et Clive, à cause de la commission qu'on prend sur les paris. Mais Clive se bat jamais. » Comme s'il attrapait une pensée primordiale au vol, il reprend : « Tu peux rester avec Clive, au bar. Ou descendre avec moi. » La stratégie du monologue reprend le dessus, et il consulte encore l'écran de son portable. « Il n'y a pas de femme, ici. Jamais, ajoute-t-il pensivement pour lui-même. Si un mec te... Reste avec Clive, Lowell ou moi, il décrète en tournant les talons. » Saul ne veut pas entendre ce qu'elle décide. Il ne veut pas non plus le voir, ou l'envisager pendant qu'elle proteste. Il s'enfonce dans l'amas d'hommes plus ou moins jeunes, rieurs, déterminés, excités, nerveux, impatients, défoncés. Entre ceux qui s'imbibent d'alcool, les rustres qui s'apostrophent et se frappent aux épaules, au ventre ou à la nuque, et ceux qui font négligemment dépasser leurs dollars de leurs poches, Saul se souvient de ce qui compte, maintenant et pour les trois prochaines heures. Pendant qu'il échange quelques poignées et passes de main en progressant vers le sous-sol, il sait que laisser Sam arpenter librement Harcourt Hall, ce soir, alors qu'il va probablement s'éclater les phalanges ou s'entrouvrir le crâne, est l'idée la plus stupide qu'il ait eue et la tentative la plus honnête qu'il ait entreprise depuis longtemps. Rien qu'un regard par-dessus son épaule, et il ouvre la porte sur la vérité.
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMar 15 Mar - 0:04

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyMer 16 Mar - 23:39

Une fois au sous-sol, tout rentre dans l'ordre. Épaules contre épaules, il sent la sueur des sales gamins qui, comme lui, sont venus se rompre le corps. Les visages lui évoquent toujours quelque chose et, à l'instinct, il lorgne après les poings, fermés, fourrés dans les poches, serrés contre les cuisses, croisés sous les bras. La plupart, ils ont les os abîmés. Comme lui, ça n'a pas le temps de guérir. Ils cognent toujours après quelque chose, ils cognent toujours sur quelqu'un ; ils s'amusent de la seule façon qu'ils connaissent, un verre porté aux lèvres avec ce camarade que, dans quelques secondes, ils vont rosser jusqu'au sang. Pendant qu'il déambule parmi eux, parmi ses frères (même ceux d'au-delà d'Harcourt), Saul se rappelle que ça n'est jamais pour se faire mourir. C'est arrivé, naturellement, ainsi qu'il l'a honnêtement suggéré à Sam. C'est rare. On met plusieurs mois à totalement récupérer d'une défaite encaissée en ce bas-lieu mais on n'en est jamais infirme et, d'ailleurs, ils iront travailler dès le lendemain. Dans quelques heures, tout sera fini et cette urgence rappelle à Sham Weiss qu'il commande à ces instants et à ces hommes. Ce n'est pas un spectateur. Ce n'est pas une victime. Il veut tout ça, il aime tout ça, et il joue sèchement des coudes pour se rapprocher du cercle. Il veut tout voir, gueuler et boire, et, surtout, il veut son tour.

Saul oublie Samira. Il est plein, et bruyant, d'être lui et chez lui, d'être parmi les siens.

Une fois, Saul accroche les billes de Lowell. Tout se passe bien. L'argent rentre. Les combats sont favorables à Harcourt Hall, et il y aura de quoi dresser des murs entre la misère et les gens. C'est mieux, parce qu'il peut être libre de son titre maintenant. Savoir que Lowell veille à tout, aussi fidèle que s'il était le protecteur de leur saleté de bloc, ça le libère pleinement. Il veut son tour, maintenant. Il pourrait bouleverser l'ordre, rien que pour précipiter son sort. Ses mains le démangent, et ils se creusent les paumes du bout des doigts. C'est tout juste s'il le voit, les billes accaparées par le spectacle impressionnant des nez qui craquent, des pommettes qui explosent et des lèvres qui se fendent. Le sang versé n'est pas ignoré par le public ; ils le récompensent de hurlements joyeux, obscènes. Saul participe à ce concert de rugissements, le cœur toujours plus altéré par l'imminence. C'est le grand-oral. C'est le festin auquel il n'a pas su renoncer. Les cris des combattants excitent son impatience, et ça se bouscule en foule compacte pour admonester son favori. Il ne peut pas parier. Il aimerait bien. Pour le plaisir de perdre. Celui de gagner. Pour ressentir viscéralement sans s'excuser de ses tréfonds.

Vient son tour. Suffoqué par l'excitation malsaine, Saul oublie d'avancer. Il darde sur la fureur des autres un regard complaisant, à la limite d'être obséquieux. Sham Weiss n'est pas spécial lorsqu'il se bat. On ne l'attend pas lui plus qu'un autre. Du reste, le ratio du pari ne joue pas en sa faveur. Ça n'a pas de véritable importance, parce qu'il prendrait autant de plaisir à massacrer qu'à se faire massacrer. Il quitte sa place dans le cercle. L'autre a déjà franchi le trait. Jared a trente ans. Il vit sur St Bernard Avenue, avec sa femme et trois enfants. Et c'est un brave type. Ça ne compte absolument pas, d'être un brave type ou le dernier des connards, quand ils relèvent les poings en garde. Une pensée, fugace, saisit Saul avant d'engager : où est-elle ? est-ce qu'elle le voit ? Jusque-là, il était persuadé de la vouloir ou absente ou aveugle. Ivre de l'arène, ivre de ce soir, il veut plus que tout qu'elle le voit. Qu'elle l'encourage ? Qu'elle l'acclame ? Il ne sait pas quelle vague fierté on peut forger dans ces moments bassement humains. De toute façon, il n'a ni la réponse ni l'attention de Samira. Elle n'est pas là ou, en tous les cas, il ne la voit pas. Sa distraction de mâle crâne lui coûte à l'instantané. Résultat : il ramasse.

« Qu'est-ce que tu fous ? » Lowell s'était préparé une autre intonation. Néanmoins, sidéré par la cachette de la jeune femme (qu'il n'aurait certainement jamais fouillée sans le regard complice de Clive), il échoue à retenir les nuances abasourdie, méprisante, brusque et amusée, de sa voix. Aussitôt, il décide qu'il s'en fiche et lui attrape la main afin de l'extraire. « Viens. » Elle se redresse entièrement, et il est forcé de se demander, encore, pourquoi et comment elle s'est recroquevillée ainsi. Lowell ne pose plus aucune question depuis longtemps et, lorsqu'il le fait, c'est comme cela vient de se passer : sous le coup de l'émotion, aussi vif et sans conséquence qu'un bon juron. « Il a dérouillé, explique-t-il en entraînant Samira avec lui, mais, finalement, il m'a fait perdre trente dollars. » La plaisanterie vient avec le sourire, aussi naturel qu'à son habitude. C'est une tentative dont il cherche le succès dans les yeux, illisibles, de la jeune femme. Elle semble toujours si tendue, angoissée. Malgré le malaise qu'elle distille constamment en lui (elle comme Ester), Lowell sait qu'elle a de bonnes raisons à ça. En faisant preuve de compréhension, il imagine qu'elle le rendra. Juste un sourire. Une esquisse suffirait. Savoir que, sous ce vernis traumatique, survit un être humain. « Si tu ne lui dis pas que j'ai parié contre lui, je lui dis pas que t'es contorsionniste, ajoute-t-il précipitamment. » Un feulement dans sa gorge avoue sa gêne et, finalement, il pousse Samira dans le bureau. Il entre avec elle. « T'as une sale gueule, déserte-t-il l'escorte qu'il faisait à la jeune femme. » Sous les doigts de Pete, Sham Weiss siffle entre ses dents. Il a le visage épargné, sauf plusieurs éraflures à hauteur du regard. Et, bien sûr, il pisse le sang par le nez. Son adversaire a été assez compatissant pour lui laisser ce qu'il a de mieux à montrer. Et il objecte un bref regard vers Samira en ce sens. « Mais j'ai vu Jared, ricane doucement Lowell en se perchant sur le dossier d'une chaise. » Avec Saul, Pete, Lowell et Sam, il y a deux autres types – des nippers. La pièce est vraiment étroite maintenant. « T'as mal ? interroge le médecin de fortune. » Plus qu'il n'est nécessaire (comme pour faire entrer une leçon), Pete presse les côtes. Saul dit que oui, mais que ça va. Il doit faire deux mouvements avec les bras pour prouver qu'il dit la vérité. En dehors de son épaule, rouge et brûlante, et des multiples traces de coups portés au thorax, on dirait qu'il a fait n'importe quel sport qui ne demande pas de se battre. « Samira ? » Pete prend des précautions jusque dans son timbre. Il s'est rapproché de telle sorte qu'ils sont seuls à entendre. « Qu'est-ce que tu fais là ? » Il le demande comme de la trouver trop intelligence pour ces choses-là. « Ça va ? » Il avait la main sur la poignée de la porte. Il l'enlève. Il veut vraiment savoir.
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyVen 18 Mar - 1:30

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyVen 25 Mar - 9:37

Les autres lui sont agréables. Ils sont nombreux, brûlants, énergiques, et ils tiennent tous ensemble dans cette poignée de mètres carrés encombrés par les meubles, la poussière, le bordel. Cet endroit, ces murs crasses, fourmille de vie brute. Réceptif, comme drogué, car drogué, Saul les regarde faire, il les regarde être. Il grimpe à sa propre conscience : les formes, d'abord, puis les couleurs, les détails et les sons. Son tympan bourdonne – il ne le réalise pas – et le temps est légèrement ralenti. C'est faux, c'est lui : c'est l'adrénaline qui lui cavale encore dans le sang. Le temps est lent parce qu'il appréhende mieux. Il anticipe. Seulement, son attention est dispersée, à la recherche d'un danger, en quête de ce danger. Ce qui le frôle, il le comprend moins, moins bien, moins vite. Pete est patient et, au lieu de se fatiguer à seriner les choses, il lui concède quelques secondes supplémentaires pour répondre et pour protester. Ainsi, Saul s'acquitte gentiment de l'auscultation, les sens échauffés par les gestes de ses camarades, l'ivresse du combat et l'âme, vaguement hagarde, qui n'attrape pas toute la substance des évènements flottants autour de lui. Lowell a l'air ravi. Saul est immédiatement envahi par une joie primitive, et simple, qui ne prend sa source qu'à ce sourire éclatant. Le médecin est plus maussade : Pete se détend rarement, parce qu'il prendrait sur lui si quelque chose tournait mal. Il ne lui gâchera pas son bonheur, de toute façon éphémère. Alors les dernières inspections sont évacuées, une impatience infantile pour chasser les précautions excessives. Saul sait qu'il n'a rien. Il va bien, très bien. Pourquoi Pete ne voit-il pas qu'il est plein de courage, de puissance, de plaisir ? Quelles douleurs peuvent vaincre ça ? Dans sa bestialité, Saul est stupide. Il est heureux aussi. Pour la première fois depuis des semaines, des mois, il est libre de toute colère, de tout ressentiment, de toute sa haine.

Son apaisement passe de brûlant à tiède. Il savoure mieux sa liberté, et parcourt mentalement ses éléments, sa profondeur. A ses dépens, on s'agite tout autour. Les combats. L'argent. L'alcool qui va arroser cette victoire à tout point de vue. Ces considérations, matérielles et triviales, le survolent. Il goûte le bien-être diffusé dans son ventre, son thorax, ses membres, pieds et mains, le sang et l'oxygène, et tous les autres endroits qui lui font des sensations. On lui demande s'il veut être seul. Saul n'en sait rien. Il s'en fiche. Il est bien, là, et si ça perturbait son nouvel équilibre, cette euphorie inédite ? On lui demande s'il veut être seuls, qu'ils soient seuls. Ah, peut-être. Oui, c'est une bonne idée. Samira est là depuis tout à l'heure, il le savait et l'avait remarqué sitôt qu'elle était entrée, mais il lui semble qu'enfin il est un peu plus apte à échanger, à donner autant qu'il reçoit. On obéit sans qu'il ordonne.

Sam est froissée. D'une façon qu'il ne peut pas décrire, elle est abîmée et, à mesure qu'elle s'approche, il discerne toutes ses anfractuosités. « Qu'est-ce qu'il y a ? il assume son fond de naïveté. » Sa voix se brise sur le terme – il a trop hurlé son mal de vivre quand il s'érodait les jointures sur le visage d'un ami du passé. Elle a le regard trouble. Et elle parle, et elle parle. Depuis plusieurs minutes, Saul se souvient qu'il est possible de ressentir autant, avec intensité, avec fureur. Mais tous ces mots... Elle n'en finit pas d'éclater le portrait de ses humeurs, si bien qu'il en reste con, et longtemps silencieux. « Je n'ai pas mal, ici. » Il glisse de son tabouret et il enroule son bras le moins endolori autour de ses épaules : il capture les lèvres et les embrasse jusqu'à plus de souffle. Le picotement à sa bouche est délicieux. Il sent toutes les nuances de son plaisir, il peut pratiquement les nommer. Plein d'autres endroits ne le font pas souffrir : Saul ne dit rien. Ses doigts plongent dans les cheveux, effleurent les pommettes, le nez, et caressent la mâchoire. Il cherche pourquoi. « Pourquoi est-ce que je dois t'en vouloir ? » Sur le moment et ne la voyant pas, il avait été piqué par la déception puis il n'avait plus eu le temps pour ça. Maintenant, il voudrait simplement comprendre ce que ce crâne, adorable et secret, renferme et cache de lui. « Qu'est-ce que tu faisais ? » Une pointe de curiosité, une autre de perplexité et une dernière de jalousie. Saul réalise qu'il ignore où elle était. Dans Harcourt Hall. En sécurité, c'est certain. Quand a-t-il commencé à être si négligent, et égoïste ? Mordu par une amorce de culpabilité, il se ronge la lèvre et dépose des baisers au coin de la bouche, de l'oeil, du nez. Il tâche d'éteindre plus fort, mais ses côtes brûlent. Refusant d'abandonner son devoir sacré à la douleur futile, il presse Samira contre lui et ravale la peine qu'elle lui fait. C'est si difficile, aujourd'hui, si pénible, et bon. Il veut l'entendre, encore.
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyVen 6 Mai - 21:51

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyJeu 2 Juin - 22:39

Il faudrait être idiot, ou carrément aveugle, pour ne pas voir qu'elle s'apprête à mentir. Au travers de son épuisement, Saul observe la façon que Samira a de se détendre (de feindre de le faire) et cet air qu'elle emprunte alors qu'il ne figure jamais au registre de ce qu'elle est. Il ne la connait pas si bien. Il se trompe plus souvent qu'à son tour. On le dirait certainement imbécile si, quelques fois, il ne se retenait pas d'avouer qu'il ne comprend rien, ni aux filles ni à Sam. Ni à bien d'autres choses, du monde, de son siècle. Néanmoins, il capte le tranchant de ses mensonges avec une acuité grimpante. Et, alors qu'il l'enlace et se plait à sentir la chaleur de Samira qui rencontre la sienne, elle se prépare à lui inventer une histoire, une version de l'histoire, qui ne sera jamais convaincante. Du reste, elle doit le savoir. Ce qui renvoie Saul à : doit-il, à son tour, faire semblant de la croire ? Ce n'est rien dont il ait l'habitude de décider et, avec elle, il apprend seulement. Il aimerait mieux résoudre une guerre de territoires, où n'importe quoi qui exige de tenir une arme et de s'en servir contre quelqu'un, plutôt que de s'esquinter contre Samira. Il lui semble, en outre, qu'il a beaucoup fait – et beaucoup commis – en un seul jour. Si c'était peut-être trop pour elle, c'était certainement trop pour lui. Accaparé par ses hypothèses amoureuses, Saul ne réalise pas encore qu'elle a pénétré loin en lui et que ça n'a rien de plaisant. Lorsque l'adrénaline sera redescendue aussi salement que les vapeurs d'alcool s'évanouissent du sang, il aura toutes les facultés pour se sentir violer dans quelque chose d'intime. Il le soupçonne depuis qu'il a rejeté Samira de son esprit. Tout le temps où il n'a pas pensé à elle, tout le temps où il n'avait qu'à abattre ses poings sur le visage de Jared, il s'était senti libre. Et c'est elle qui fait affluer son angoisse. Encore maintenant, alors qu'il réintègre l'amertume de son existence, Saul se soucie bien trop de Samira pour se soucier de lui.

« D'accord, il esquive à son tour. » D'une certaine façon, il se préserve le bonheur. Ça ne durera que quelques secondes, mais il choisit de les piller au nom de tout ce qu'il a sacrifié avant, et de tout ce qu'il s'en va sacrifier, plus tard. Il attrape ses baisers et fait semblant de la croire. Ça lui fait mal dans les côtes comme dans le cœur mais, tant que c'est supportable, il tient. A chaque détail qui s'imprègne douloureusement en lui, à chaque aspect qui l'intègre péniblement dans ce monde, il ment de moins en moins, ou de moins en moins bien. Au sourire éclatant de Samira, le sien décline. Saul n'est pas triste. Il est las. Au moins n'est-il plus en colère. En vérité, tous les états sont préférables à celui-là : c'est le choix du moindre mal qu'il fait. « J'ai envie de rentrer. » C'est plus complexe que ça : Saul aimerait être seul. Vraiment seul. Comme il ne l'est plus depuis longtemps. Comme il ne l'a jamais été, peut-être. Ça ne figure pas au menu de ses besoins. Il aime le monde, le bruit, la vie. Le silence lui est insupportable tandis que la solitude lui pèse. Mais, pour l'instant, il voudrait l'espace le plus vaste du monde et être sourd à défaut d'être seul. Ça n'arrive pas – comment ce serait possible ? Saul ne peut pas s'éloigner d'Harcourt Drive. Alors il doit rentrer. D'une célébration alcoolisée ou de son tour de garde, là encore, il choisit ce qui l'usera le moins. Et il pourra se couler sous la douche. Doucement, il se répugne. La sueur, et le reste. Le reste pire encore que l'effort. Aussi le plaisir le déserte et l'enthousiasme se meurt. Il ne peut rien reprocher à Samira, quand même il sait qu'en son absence les abysses qui l'étreignent ne l'auraient pas aussi bien rattrapé. Et Sam qui le maintient sous le feu de son regard. « Oui, j'ai envie qu'on rentre, dit-il pour finir de se convaincre. » Ce n'est pas de sa faute. Ce qu'il se passe dans le sous-sol d'Harcourt Hall n'a rien à voir avec Samira Foxx, c'est tout. Il ne fallait pas gâcher ces deux sphères magnifiques en les réunissant. D'avoir erré, Saul revient prudemment sur ses pas et remonte le chemin qu'il a été stupide de dévaler. « Tu viens ? » Question mensongère. Bien sûr, elle vient.

Les soubresauts de la voiture lui brûlent les flancs. Il ne dit rien.
La vitre entrouverte, il hume la fraîcheur de l'air. Il ne dit rien.

Lorsque Saul arrête la voiture sur le trottoir qui devance sa maison, il pose la paume sur le genou de Samira. Ce n'est qu'après une poignée de secondes qu'il bascule le regard vers elle, et : « Je suis désolé. » Ce jour s'achève comme il a commencé.
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Samira Foxx
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptySam 4 Juin - 22:22

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Saul Weiss
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MessageSujet: Re: et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi   et si nous deux c'est mort, alors c'est mort pour moi EmptyDim 5 Juin - 20:01

Pitié. Pitié, ne demande pas. S'il te plait, Sam. Ne me force pas à... Sa prière inachevée, la question de la douce brûle son tympan. Comme il savait qu'elle mentirait, elle sait pourquoi. Si elle l'ignore, elle le devine. Si elle ne devine pas, alors que font-il tous les deux ? Ce soir, Saul ne sait plus très bien et il baisse mentalement les bras. Samira et lui ne se sont pas trouvés comme tous les autres le font et, d'ailleurs, c'est ce qui rend leurs relations si difficiles et si intenses. Ce soir, il est suffoqué par ce qu'il voit. Son cœur, passionnément accroché aux genoux de cette fille, bat sa poitrine comme de vouloir la rompre mais il contemple un être qu'il se contente de soupçonner et qui, en retour, le connait mal. Dans ce cas, à quoi bon cette conversation ? Et à quoi bon la provoquer ? Puisqu'il savait que ses mots feraient cet instant, et qu'il le haïrait. Alors il est là, il est con, et il ne sait pas l'expliquer. Aussi profond qu'il cherche, il est désolé. Machinalement, il est désolé. Sincèrement, il est désolé. Puis, quoi ? Incapable de le dire, d'en formuler une amorce, d'en ébaucher un trait, Saul laisse sa main où il l'a déposée et il scrute Samira avec l'espoir qu'elle les délivre. Au prix d'un silence increvable, le malaise s'installe. En lui. En elle. Et dans tout l'habitacle. Une seconde. Dix. Vingt. Cent. Parfois, ses lèvres tremblent mais aucun son n'en sort. Comme il savait qu'elle mentirait, elle sait pourquoi. Pitié, Sam. Ne fais pas ça.

A je, un nouveau souffle va profond dans son être et lui vide la cage thoracique de la pression. Les doigts de Sam lui remontent la peau et il frissonne moins de ce qu'elle fait que de ce qu'elle dit. C'est plus facile, si elle arrête de faire semblant. C'est plus facile, s'il n'est pas forcé d'inventer ce qu'il se passe ensuite, pour tous les autres, en temps normal, alors qu'il n'en sait rien. Bien qu'elle pulvérise l'évidence en l'étalant entre eux, Saul est tremblant mais soulagé. Elle sait mieux faire que lui. Il s'en remet à elle. Pour les prochaines minutes, il voudrait qu'elle débite ce qu'ils savent tous les deux, tout ce qu'il sait qu'elle sait qu'il sait... Bien que ce soit ridicule, il se replie tout entier derrière sa petite lâcheté et il attend. Les billes rivées à Sam, il reste silencieux, attentif, mais stoïque. Et, sagement, il écoute.

Elle est belle, Samira. Les mots qu'elle dit sont douloureux, affreux, pénibles, mais ses yeux sont sublimes. Saul ne le découvre pas : il ne se lasse jamais de le relever. Ça n'est pas sa beauté à proprement parler, ça, c'est à la portée de toutes les billes qui glissent sur elle ; c'est l'éclat qu'elle possède quand elle lui parle. Suivant qu'elle le regarde ou suivant qu'elle l'esquive, suivant qu'elle hésite ou suivant qu'elle s'affirme, il perçoit toutes les variations. Elle se bat constamment. Elle n'abandonne jamais. Comme si ce n'était pas assez d'affronter ce monde (qui, pour eux, est un peu plus cruel qu'il ne l'est de toute façon), elle lutte contre ses ombres et s'esquinte contre elle-même. Et elle s'abîme pour lui. Ça cogne à l'arrière de son crâne. Parce qu'à chaque syllabe, c'est pour lui, c'est vers lui, qu'elle progresse. Saul est blessé de ce qu'elle fait sans qu'il l'exige ni le mérite. Il a envie de l'interrompre. Il essaie. Hoquet après sursaut, souffle retenu après battement manqué, foutrement, il essaie. Mais rien, rien du tout, n'échappe à ses lèvres vissées. Atterré, pétrifié, son crâne cherche les mots, ses tympans paniquent à l'idée de perdre un son, et sa gorge s'assèche. Parce que sa main s'agite, il la reprend et la serre en un poing qu'il fourre quelque part entre sa poche et sa poitrine. Comment serait-il capable d'en dire autant ? Même plus ? Il est pauvre, désarmé, et il n'a pas du tout envie d'être là.

Dans leur tentative, ils sont magnifiques. Magnifiquement vains.

La portière claque. Rien que d'aller et venir le long de la voiture, il creuse un sillon. Une boule de rage pour lui étrangler le cœur, Saul ne fait plus le tri entre sa colère et sa crainte. Est-ce qu'il a seulement le choix ? Est-ce qu'il peut réellement abandonner ? Est-ce qu'on l'a jamais vu abandonner ? Brusquement, il fait le tour et tire sur la poignée qui découpe Samira, encore clouée sur son siège. « Descends. » Moins d'une seconde après : « Descends. » Le timbre cassant, il piétine et son impatience crève le silence et fend l'obscurité. A chaque mouvement qu'elle fait pour obéir, il avale une bouffée d'air plus courte que la précédente. Puis quand ça y est, qu'elle se tient droite malgré toutes les raisons qu'elle aurait de plier, se cacher, pleurer, le frapper, Saul la plaque contre la voiture et lui pille un baiser. Au flanc et à la gorge, il la tient et la retient. Il mord dans sa lèvre et plonge la langue dans sa bouche. Indécemment, il veut la prendre, maintenant. Pour de mauvaises raisons. Parce qu'il ne sait pas comment faire, autre chose et autrement. En s'accrochant l'index au collier à sa gorge, Saul se sépare de Samira mais ça n'est qu'à si peu de distance que son souffle entre en lui, et le sien en elle. Contre elle, il vibre et se raidit. Les yeux de Sam sont beaux, mais putain qu'ils sont difficiles à soutenir. « C'est moi. » Ses yeux vont à ceux de Samira, d'une pupille à l'autre. Frénétique et impénétrable, Saul mesure ce qu'il aime à ce regard avant de se prononcer. « Je te défends, je te protège, c'est moi. » Par la nuque, il l'étreint et il la serre si fort que c'est lui qu'il console. « Je te protègerai toujours. Je te choisis. » D'elle et de lui : « Je te choisis. » Saul lève un regard humide vers Sam.

Au dernier moment, il frappe sur la tôle et il recule. Saul plante les dents dans sa lèvre et ça saigne en même temps que : « M'abandonne pas. T'as pas besoin d'une arme. Tu m'as, moi. Garde-moi. » La supplique fissure la rage. « Je le ferai plus. Je ferai que ça. » Il n'arrive pas à dire ce qu'il voudrait, et ce qu'il crache n'a pas tellement de sens. C'est impossible pour lui. Peut-être. Mais c'est tout ce qu'il a. Il ne se choisira plus. Il ne fera que la choisir, elle.
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