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Reese Jackson
Reese Jackson
admin ○ nightcall


○ messages : 634

MessageSujet: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptyVen 18 Sep - 6:50


– going under –


La douleur. À perte de vue, recouvrant le monde d’un brouillard opaque. Ne plus rien imprimer d’autre, ne plus rien ressentir. Les yeux vrillés sur la loupiotte jaunâtre qui danse dans son champ de vision. Se laissant aveugler, jusqu’aux points noirs venant danser avec les papillons de la souffrance. La respiration sifflante, le rouge dans son champ de vision, sang qui s’écoule lentement. Elle ne peut plus le cracher, alors elle l’avale. L’impression que le ciel descend peu à peu vers elle, et n’a jamais été si proche de l’engloutir. Elle ne sait plus si elle veut le laisser faire, ou tenter vainement de l’en empêcher. Elle ignore si elle a le courage de se relever et de partir, avant que la fin du monde ne recouvre ses épaules d’un linceul rassurant.

Elle a perdu. Elle s’est battue comme une lionne, mais ça n’y a rien fait. Ça n’y a jamais rien fait. La louve a toujours gagné, mais ça n’a pas empêché sa sœur de continuer d’essayer. Continuer de lui pourrir la vie, continuer de lui faire des reproches, et de lancer le premier coup. Parce qu’il en faut une qui commence, et une qui termine. Que parfois, c’est la même personne. Mais que dans le cas des jumelles Jackson, ce n’est que rarement le cas.

Se rassembler. Se ressaisir. Elle peut pas rester là. Sinon un clochard va finir par la trouver et lui faire les poches. Il n’aura pas de mal à la croire morte, étendue là, les yeux ouverts mais le regard vide, à moitié défigurée. Pour peu qu’il ait un peu bu, il ne verra même pas sa poitrine se soulever, ne remarquera pas le clignement infime des paupières. Il ne verra plus qu’une enveloppe morte, avec du fric dans les poches et des vêtements sur le dos.

Se reprendre. Se lever. Mais le sol tangue trop. Le monde est trop haut. On est bien, en bas. On ne se soucie plus de rien, et on peut regarder les choses passer sans plus s’en préoccuper. Au final, c’était comme si on en devenait intouchable. D’une certaine manière, il ne peut rien nous arriver de pire, rien nous arriver de plus. Le sol est bas, le monde est haut. La marche à gravir est démesurée. Et pour la première fois depuis de longues années, RJ n’est pas sûre d’y arriver.

Pourtant, il le faut. Au milieu du chaos de ses pensées, au milieu du capharnaüm de la douleur, les bouclettes brunes et les grands yeux innocents se dégagent. Evey. Elle ne peut pas l’abandonner. Elle n’en a pas le droit. Sa fille compte sur elle. Il faut qu’elle aille la chercher. Il faut qu’elle aille la retrouver. Mais le bitume est confortable, et la peur de voir les larmes dans les yeux de l’enfant la terrifie. Elle ne trouve pas le courage de se relever et d’y aller. Elle ne veut pas infliger la vision de sa déchéance à Cal. Il a déjà tiré une drôle de tronche en voyant les restes de la raclée de la veille. Elle ne peut pas lui faire ça, à lui non plus. Laisser les innocents ensemble. La soirée sera suffisamment courte. La vie les rattrapera suffisamment vite. Pas b’soin de leur infliger ça. Pas l’droit.

Alors elle reste couchée là. Carcasse sur le trottoir. Elle ne sait plus depuis combien de temps elle est immobile, gisante. Elle se souvient d’avoir vu l’ombre de Tara l’enjamber et puis partir. Depuis, plus rien. La nuit, la chaleur de la ville et du bitume. La souffrance. L’étourdissement s’est progressivement envolé, mais les points de douleur sur son crâne persistent. Elle a repris un peu de consistance ; et, progressivement, elle a retrouvé sa faculté de penser.

Alors, ses jambes décident que ce sont leur tour. Ses bras s’articulent, se rapprochent de son corps. La carcasse ensanglantée s’appuie sur ses mains écorchées. Elle se redresse. Dos voûté, douloureux. Ses jambes reviennent vers elle, et elle réussit à se hisser à leur sommet. Elle ne titube pas. Elle ne flanche pas. Elle a suffisamment attendu pour être capable de faire ça. Une main sur sa hanche. Les points de sang tachent sa paume. Elle s’est fait mal en tombant, mais ce n’est pas le plus grave. Le plus grave c’est la tête, que sa main vient effleurer juste après. Et elle regarde ses doigts, l’œil vide. Le carmin est si brillant. Si liquide, si glissant. Si chaud. Son bras retombe le long de son corps, et elle fait un pas. Puis deux. Ses jambes répondent, son corps enchaîne.

Marcher. Pas de taxi, pas de bus. Elle ne sait même pas si on la laisserait monter. Marcher. Ses doigts se rendent compte qu’elle a perdu son élastique pendant la bataille avec Tara. Alors ils défont progressivement ce qu’il reste de sa natte, tandis qu’elle continue d’avancer. Elle étale le sang dans ses cheveux, mais elle n’y pense pas ; ça n’a plus d’importance. Tout ce qui compte, c’est de continuer à marcher. Elle rabat la capuche sur sa tête. Un pied devant l’autre. Elle sait où elle va. Elle ne sait pas pourquoi, elle ne sait pas ce qu’il pourra y faire. Mais elle y va. Parce que y a bien personne d’autre, sur cette foutue terre, qu’elle se sente d’aller chercher. Elle a confiance en eux ; en les autres. Mais elle a besoin de lui. Et ça ne s’explique pas.

Marcher. Traîner les pieds, user les semelles. Essuyer le sang sur le menton, sous le nez. La démarche de plus en plus assurée, de plus en plus rapide. Elle va y arriver. Dans le fond, il n’habite pas si loin. Et elle réussit à marcher plus vite que ce qu’elle ne pensait. Dans une petite demi-heure, elle y est.

Ça prend vingt minutes. Vingt minutes et elle arrive dans la rue. Ses jambes tremblent mais elle ne les écoute pas. Son corps est au bout du rouleau, mais elle y fait la sourde oreille. Faudrait appeler Cal, lui dire qu’elle ne viendra pas chercher Evey. Mais elle peut pas. Elle y arrive pas. Il faut qu’elle se pose, avant. Alors au moins, prévenir Wayne. Lui dire qu’elle arrive. En remontant la rue, elle fouille au fond de sa poche. Ses doigts abîmés, écorchés, phalanges à la peau arrachée, attrapent le petit téléphone. Elle rappelle un des numéros récents. Et ça sonne, alors que ses pieds continuent de traîner. Elle ne croise personne, et heureusement. On la regarderait de travers, avec sa capuche enfoncée sur la tête, et sa main dévoilée dans un sale état. L’autre n’est pas beaucoup mieux ; rien qu’un peu. Ça sonne. Et enfin, ça décroche.

« Wayne ? » Entendre sa propre voix lui fait l’effet d’un coup de poing dans l’estomac. Elle ne la reconnaît pas. Les notes graves, déchirés, éraillées. Un fond de sanglot monté là par la douleur, qu’elle n’avait même pas senti arriver. Et elle s’écoute parler, les yeux dans le vague, fixés sur la lumière qui danse par la fenêtre. « Je suis là. Je suis devant chez toi. Est-ce que tu peux m’ouvrir ? S’te plait. » Elle est allée jusque sur le pas de la porte. Elle s’est sentie enlever sa capuche. Il s’est mis à pleuvoir alors qu’elle remontait l’allée, et elle sent l’eau rafraîchir son visage bouillant de souffrance. Le tour de l’œil virant au violet, et la paupière ayant un peu de mal à rester ouverte ; le nez cassé ; un impact net en haut du front, duquel le sang ne semble pas vouloir arrêter de couler. La lèvre inférieure salement fendue, et une profonde entaille en haut de la pommette, à force de coups répétés. Le corps doit lui aussi être bleu d’ecchymoses. Mais personne n’a besoin de le savoir. Elle peut rester la seule à les sentir.

Elle se force à déglutir. Du sang plein la gorge. Et elle s’essuie le menton et le nez d’un revers de manche, sans prendre garde à la douleur. Murmurant. Gémissant. « S’te plait… » Ouvre-moi.

S’te plait. Me laisse pas là.



(c) elephant song.
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Wayne Hoffman
Wayne Hoffman
admin ○ nightcall


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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptyVen 18 Sep - 18:58

I know that I'd die without you.
— reese jackson & wayne hoffman —
Come to me In the night hours, I will wait for you And I can’t sleep Cause thoughts devour Thoughts of you consume. I can't help but love you Even though I try not to. I can't help but want you I know that I'd die without you. Stay with me a little longer I will wait for you, Shadows creep And want grows stronger Deeper than the truth. I can’t help but be wrong in the dark Cause I’m overcome in this war of hearts. — war of hearts.

D'un geste las, Wayne balança un énième dossier sur la table basse avant de s'enfoncer lourdement dans le canapé. Il était fatigué et pourtant le sommeil ne venait pas. Les insomnies étaient fréquentes depuis Jigsaw. Cette épreuve l'avait traumatisé et il avait bien du mal à s'en remettre, on lui avait prescrit des tas de médicaments qu'il ne prenait pas, des séances chez le psychologue qu'il préférait éviter, alors sans doute qu'il ne devrait s'en prendre qu'à lui même pour la stagnation de son état mental, mais il lui semblait que c'était mieux ainsi. Le psychologue le faisait chier, raconter sa vie au premier péquenot qui passait simplement parce qu'il avait un diplôme en psychologie ça ne le tentait pas du tout. Puis les médicaments, il savait bien que ça pouvait faire autant de mal que de bien. Est-ce que ça valait la peine de prendre le risque de finir avec un Alzheimer d'ici vingt ans, à cause de médicaments pour pouvoir dormir à peu près convenablement. En plus, ça rendait addict ces conneries, s'il commençait, il savait que plus jamais il ne pourrait pioncer en paix sans médocs. Alors il préférait les nuits blanches. Ça lui permettait de bosser tranquillement sur son canapé. Il soupira avant de se redresser et de prendre un autre dossier. Son ordinateur à côté de lui, ses lunettes sur le nez, il essayait de rester concentrer sur ce qu'il faisait, mais plus l'heure avançait, plus il lui semblait que ça devenait compliqué. Peut-être qu'il devrait allumer la télévision pour glander devant cinq minutes. Il soupira avant de repuisser son dossier et de se pencher vers la table basse pour attraper la télécommande et commencer à zapper les nombreuses chaînes complètement inutiles de la télévision. Il y avait définitivement trop de chaînes et clairement pas assez de programmes. D'autant plus qu'il était tard, alors trouver quelque chose d’intéressant à une heure pareille, c'était peine perdue.  Pourtant il zappait, passant à peine quelques secondes sur une chaîne avant de changer à nouveau. La nuit allait être longue. Entre les émissions à deux balles et les reportages à la con, il était servit. Peut-être qu'il aurait de la chance s'il tombait sur le film de cul et encore, même ça c'était loin d'être son truc. Dans un nouveau soupire, il balança la télécommande sur la table avant de se lever pour traîner des pieds jusque dans la cuisine, il revint quelques minutes après avec un verre et la bouteille de whisky, ça au moins ça aurait le mérite de l'occuper. Son verre remplit sur la table, il décida d'allumer la console de jeu, perdu pour perdu autant se lancer là-dessus. Il y avait peu de chance pour qu'il trouve quelque chose de mieux à faire pour occuper cette énième nuit blanche. Il regarda son téléphone portable, dans le doute, histoire de voir si jamais il n'aurait pas reçu un appel du commissariat qui aurait besoin de lui, mais rien. Alors il laissa tomber me téléphone à côté de lui sur le canapé, entre une pile de dossier, son ordinateur portable, les télécommandes et plusieurs bouquins qui avait vaguement feuilleté plus tôt dans la soirée.

Concentré sur son jeu et ne s'attendant définitivement plus à recevoir le moindre appel, il sursauta légèrement en entendant son téléphone.  Il fronça légèrement les sourcils en voyant le nom de Reese s'afficher sur l'écran. Il était tard, pourquoi est-ce qu'elle l'appelait à une heure pareille ? Il n'aimait pas ça, il savait d'expérience, que les coups de téléphone en plein milieu de la nuit n'étaient jamais signe de bonne nouvelle. « Allô, Reese ? » Il se leva rapidement du canapé, sentant les battements de son cœur s’accélérer au fur et à mesure qu'elle parlait, sa voix n'avait rien de rassurant.  Il se précipita vers la porte d'entrée, raccrocha le téléphone pour le déposer sur le meuble à côté, puis il retira la chaîne de la porte, puis attrapa les clefs pour venir déverrouiller la porte, premier verrou, second verrou. Il devenait légèrement parano depuis qu'il avait été pris au piège par Jigsaw, ajouter un second verrou sur sa porte n'était qu'un exemple parmi tant d'autres, des choses qu'il avait faites pour se sentir plus en sécurité. La porte ouverte, il découvrit Reese, dans un état déplorable. « Nom de dieu, qu'est-ce que … »  Qu'est-ce qui avait bien pu lui arriver ? La question n'avait pas franchit le seuil de ses lèvres, il était trop choqué, trop perturbé pour pouvoir parler. Mais il fallait qu'il se reprenne, il fallait qu'il fasse quelque chose. Il fallait qu'il l'aide. Il se précipita vers elle, une main dans son dos, l'autre derrière ses jambes pour pouvoir la soulever et la ramener à l'intérieur. Il claqua la porte d'entrée derrière lui, en donnant un rapide coup de pied dedans. Il se dirigea rapidement vers la salle de bain, ce n'était pas qu'il ne voulait pas la déposer sur le canapé dans cet état, le canapé, il s'en fichait, il en avait vu d'autres. C'était surtout qu'elle était recouverte de sang, quasiment de la tête aux pieds et puis elle était restée sous la pluie, l'eau chaude ne pouvait pas lui faire de mal. Arrivé dans la salle de bain, il déposa la jeune femme au pied de la baignoire. « j'sais pas ce qu'il t'est arrivé, mais tu ressembles à rien, faut remédier à ça ... » Tentative d'humour ratée, il aurait mieux fait de la fermer, ce n'était pas drôle et en plus il n'avait pas envie de rire. Il ouvrit le robinet pour commencer à remplir la baignoire, puis accroupi en face de Reese il détacha son sweat avant de le faire glisser le long de ses épaules découvrant de nouvelles ecchymoses. Il y avait sur son corps, des bleus, des plaies, des marques qui lui étaient étrangement familières, c'était ce qu'il avait vu dans la glace pendant un moment après l'épreuve de Jigsaw. Il serra les mâchoires à cette pensée, ce n'était pas le moment de se laisser retomber dans les souvenirs de cet événement. Reese avait besoin de lui. Il fallait qu'il se concentre. Il tacha de chasser au mieux les images qui s'imposaient à son esprit pour se concentrer sur ce qui comptait pour le moment.  Reese. Lentement il continua de retirer ses vêtements pour ensuite l’aider à grimper dans la baignoire. Assis sur le rebord de la baignoire, il attrapa le jet d’eau pour mouiller ses cheveux, passant des mains dessus pour retirer le sang qui s’était glissé dans les mèches de ses cheveux, teintant l’eau du bain de rouge. Tant pis, il la changerait, le but de cette flotte étant surtout de la réchauffer. Il éteignit le jet, le reposant sur le bord de la baignoire avant d’attraper le visage de la jeune femme entre ses doigts. Le fixant dans les détails, passant aussi délicatement que possible ses doigts sur son nez. « C’est cassé je pense. J’peux t’le remettre en place mais ça va faire mal. » Elle n’était sans doute pas à ça prêt vu l’état dans lequel elle était, mais il préférait le préciser. Il avait l’habitude lui, à cause de la boxe ou de son job, les coups dans le nez, il en avait connu plus d’un, avec le temps il avait appris à s’en occuper tout seul plutôt que de se précipiter aux urgences et puisque Reese était venue jusqu’ici et non à l’hôpital, c’était peut-être pour une raison, sans doute pas une bonne d’après lui, mais bon, il voulait l’aider, alors pour l’instant, il n’allait pas insisté sur ce qui avait pu lui arriver. Pour l’instant.
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Reese Jackson
Reese Jackson
admin ○ nightcall


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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptyVen 18 Sep - 20:20

– i died again –


Il a raccroché. Elle a entendu au loin des pas, et elle sait qu’il est en chemin. En chemin pour traverser la maison, et venir la chercher. Venir la récupérer, ensanglantée sur le pas de sa porte, comme il ne l’a probablement jamais vue auparavant. Elle lève les yeux vers lui lorsque le battant s’ouvre. Et à sa question avortée, interrogation choquée, elle ne se confond qu’en esquive, la petite lionne. Marmonnant, murmurant. « Salut… » Son regard descend un peu. Honteux, mais surtout fatigué. Debout en face de lui, elle sent ses forces diminuer, l’adrénaline de la survie retomber. Elle est presque rendue en sécurité, n’attendant que de franchir le pas de la porte pour décréter qu’elle l’est vraiment. Il ne lui laisse pas la possibilité d’aller jusque là. Et alors que ses yeux vides se perdent à l’intérieur du havre de paix, elle sent un bras s’enrouler autour de son dos. L’autre se glisse sous ses genoux, et le colosse soulève la plume, sans que celle-ci n’ait le courage de lui résister. Molle et désarticulée, elle réussit à faire bouger son bras pour le passer autour du cou de Wayne. Il la tient, mais elle veut s’accrocher. Un peu. Rien qu’un peu. Prouver qu’elle n’est pas totalement arrivée au fond du gouffre, prouver qu’elle est encore capable de se débrouiller. Mais elle ne peut rien faire d’autre. Et ce petit geste d’une fierté déplacée ne lui fait que prendre conscience de la douleur que son épaule lui renvoie. Y a-t-il seulement un endroit où elle n’ait pas mal ?

Elle ferme les yeux quelques instants, s’octroyant enfin le droit à un peu de repos. Les bras sont chauds, doux. Et pourtant, même lovée là, elle a froid. Comme si son corps abaissait sa température pour survivre, écoulant les degrés avec le sang. Elle sait qu’il va trouver le moyen d’arranger ça, sans qu’elle ne lui dise rien. Elle sait qu’il va faire ce qui s’impose. Elle sait qu’il prendra soin d’elle. Et lorsqu’elle rouvre les paupières, c’est pour voir le décor de la salle de bain, pour sentir le corps qui se voûte doucement et lui permet de redescendre. Elle s’agrippe un instant à son col, met pied à terre. Et elle en a oublié sa hanche, la sauvageonne ; mais dès que ses jambes se contractent pour la tenir, elle n’a pas le choix de s’en souvenir. Elle essaie de ne pas grimacer ; peine perdue. La douleur fige son visage dans une moue épuisée, et elle serre ses bras autour de son corps tandis qu’il murmure. L’ombre d’un sourire passe, les yeux s’habitent d’un reflet de légèreté. « Tu vas faire quoi, me maquiller pour essayer d’faire disparaître tout ça ? Et puis j’te signale que j’aurais très bien pu marcher jusque là, hein. » Mais sa voix faiblarde n’est pas aussi convaincue que les mots semblent l’être. Et comme pour surenchérir, son corps la force à s’asseoir sur le bord de la baignoire. Reposer ses jambes, reposer sa hanche. Et ses côtes qu’elle sent la faire souffrir à chaque inspiration, à chaque tentative de rester fière et dressée. Alors qu’il s’accroupit pour la déshabiller, elle ne dit rien. Elle sait que cette fois, il ne regardera que pour constater l’étendue des dégâts. Elle sait que la mise à nu n’est peut-être pas celle qu’il aurait espérée en la voyant débarquer. Elle voit sa mâchoire se contracter légèrement en apercevant les hématomes épars. Et elle sent la culpabilité pointer. Un petit murmure, d’entre ses lèvres amochées. « Ça va aller ? … » Elle sait qu’il avait les mêmes ; en pire. Elle se doute qu’il a l’impression de se revoir dans un miroir, et ça lui fait mal. Elle se sent mal. Elle se dit un instant qu’elle aurait peut-être mieux fait d’aller voir quelqu’un d’autre. Vince, ou Cal. Mais c’était Wayne qu’elle voulait.

Et elle essaie de se convaincre, au fond d’elle, que s’il ne l’avait pas aidée à se dévêtir, elle aurait pu y arriver seule. Elle tente bien de se persuader, la petite lionne ; mais rapidement, lorsqu’elle se redresse, nue, et va pour monter dans la baignoire, elle sait que son orgueil lui ment. Son bras est obligé de s’accrocher à Wayne, et elle se sent soudain beaucoup trop faible. Les courbatures, l’affaiblissement musculaire d’avoir tant donné pour frapper, tant donné pour encaisser. La fatigue de combattre les douleurs que la veille avait imprimées sur elle. Et sa raison admet finalement que si le colosse n’était pas là pour l’aider à mettre un pied puis l’autre dans l’eau bouillante, elle se serait sûrement laissée tomber en arrière, sans même chercher à se remettre sur pieds ou à se déshabiller.

L’eau lui fait du bien. Elle ne sent pas la douleur refluer, mais elle sent le froid s’en aller. Elle grimace lorsqu’il amène le jet tiède sur sa tête. Les plaies la lancent furieusement, et elle se crispe complètement dans la baignoire, sans chercher à empêcher son corps de manifester sa souffrance. Ses dents se serrent, ses yeux se ferment, et elle tremble. Lorsqu’il passe la main dans ses cheveux pour les rincer du sang, elle a un bref mouvement de recul. Il a touché le point d’impact, il a touché l’endroit qui blesse. Elle essaie de se calmer, essaie d’oublier qu’elle a mal. Et elle marmonne légèrement, entre ses dents serrées. « Désolée. » Elle sent les mains attraper son visage et elle se tourne, les cheveux dégoulinants amassés dans son dos, le sang dilué coulant sur le côté de son visage, et toujours un peu de son nez. Elle se force à décrisper sa mâchoire, elle le laisse l’observer. Ses yeux fouillent les siens, et elle tente d’oublier que son œil droit n’est pas aussi grand qu’il le devrait. Mais lorsqu’il passe ses doigts sur son nez, elle grimace à nouveau. La délicatesse a beau être de mise, elle a un léger mouvement, comme une enfant qui tenterait de se dégager. Et puis elle soupire, appuie sa pommette intacte contre une main de Wayne. « Fais ça vite, alors. » Que j’sois débarrassée. « J’te promets que j’essaie de pas bouger. » J’sais pas si j’vais y arriver, mais faut pas m’en vouloir ; t’as vu mon état ?

Et par anticipation, une de ses mains s’accroche au bras puissant. Elle ferme les yeux. L’attente insupportable, la peur d’avoir encore plus mal. « Tu m’aimeras toujours si j’te griffe de douleur ? » Elle ne réalise pas le simple petit mot qu’elle a employé. Et c’est à vrai dire bien le cadet de ses soucis. Elle veut qu’il remette ça en place une bonne fois pour toute, et qu’ils puissent passer à autre chose. Même si tout ce qui promettait de venir risquait de lui être tout aussi douloureux et insupportable. Elle ne dirait rien, et elle tâcherait de rester en place. Rester à sa place. Après tout, elle l’avait bien mérité.
Comme dit le proverbe : qui sème le vent récolte la tempête.


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Wayne Hoffman
Wayne Hoffman
admin ○ nightcall


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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptySam 19 Sep - 20:26

I know that I'd die without you.
— reese jackson & wayne hoffman —
Come to me In the night hours, I will wait for you And I can’t sleep Cause thoughts devour Thoughts of you consume. I can't help but love you Even though I try not to. I can't help but want you I know that I'd die without you. Stay with me a little longer I will wait for you, Shadows creep And want grows stronger Deeper than the truth. I can’t help but be wrong in the dark Cause I’m overcome in this war of hearts. — war of hearts.

Qu’est-ce qui avait bien pu se passer pour que Reese termine dans un état pareil ? La question était là, au bord de ses lèvres, mais il n’osait pas la prononcer. Pas encore. Elle ne s’en sortirait pas sans explications, elle devait bien en avoir conscience ou peut-être qu’elle n’avait pas pensé à ça en venant jusqu’à chez lui, sans doute qu’elle avait eue d’autres priorités à ce moment là, mais maintenant, elle était là et c’était impossible qu’elle s’en tire sans lui avouer ce qui lui était arrivé. Il avait besoin de savoir et puis, peut-être qu’il pouvait faire quelque chose avec son statut de flic. Elle devait porter plainte et lui, il devrait retrouver le type qui lui avait fait ça pour lui coller son poing en pleine figure. Ou pour le foutre en taule, ça marchait plus comme ça dans la police. Même si y en avaient plein qui méritaient une bonne torgnole dans leurs faces, logiquement, il ne fallait pas frapper. Elle, elle s’était fait frapper. Il pouvait le deviner facilement, parce qu’il avait l’habitude des visages amochés comme ça. Il n’était peut-être pas médecin, mais avec l’expérience, il avait appris à faire la différence entre les plaies causées par des coups et celles provenant d’une autre connerie, style un accident de la route. Elle s’était faite taper dessus, il en était certain. L’idée qu’on ait pu porter la main sur elle le dégoutait, l’énervait même. C’était sa petite amie après tout, normal qu’il ne supporte pas l’idée qu’on ait pu lever la main sur elle. Il sentait bien ses nerfs le titiller, la colère monter, mais il fallait qu’il prenne sur lui pour s’occuper de Reese. Péter un câble en cet instant, ça n’allait aider personne. En plus, il avait un sérieux problème avec la gestion de sa colère, alors il ne fallait pas qu’il explose. C’était une phrase qu’il se répétait en boucle alors qu’il portait la jeune femme pour l’emmener jusqu’à la salle de bain. Il ne fallait pas exploser.  Sa tentative d’humour aurait presque pu l’aider. C’était mieux d’essayer de plaisanter que de juste s’énerver dans le vent. Mais ce n’était pas drôle et là, il en faudrait beaucoup pour le faire rire. La réplique de Reese pourtant, réussi au moins à lui arracher un léger sourire. Rien de plus qu’un sourire qui vint éclairer un peu ses traits particulièrement tendus. « Ce sera pire si on me laisse avec du maquillage entre les doigts, crois-moi. » Il ne s’était jamais servi de maquillage de toute sa vie, il s’était déjà vu barbouiller la tronche par ses sœurs quand il était plus jeune, puis par sa fille y avait plusieurs longues années, mais lui, il n’avait jamais touché à ça, alors mieux valait éviter de s’y risquer. Autant, il était bon dessinateurs, mais ses talents d’artiste s’arrêtaient là, avec un crayon et une feuille. Rien de plus. « Mais oui, évidemment que tu aurais pu marcher jusque là. » L’ironie dont il faisait preuve n’était même pas dissimulée. Non, elle n’aurait pas pu marcher jusqu’ici, elle aurait fait trois pas avant de s’effondrer, alors elle pouvait faire la maline si elle voulait, faire la fille qui n’avait pas besoin d’aide si ça l’amusait mais, elle se fourvoyait. Sa fierté, elle pouvait la ravaler quelques minutes, parce que là, elle avait vraiment besoin d’aide et il ne savait même pas s’il était en mesure de lui apporter l’aide dont elle avait besoin. Il n’était pas médecin après tout et elle était dans un sale état. Un état qui l’agaçait lui. Un état qui lui rappelait trop le sien après s’en être prit plein la gueule lors de la session de Jigsaw. Mais il fallait qu’il reste calme, qu’il garde le contrôle. Il n’avait pas le choix. « Tu devrais te poser cette question à toi-même. » Lui, il irait bien. Peut-être que son poing finirait par aller s’écraser contre le mur ou contre le miroir au fond de la salle de bain, peut-être qu’il taperait assez fort pour se péter une phalange ou qu’il se couperait avec le verre, mais qu’importait, il irait quand même mieux que Reese, alors qu’elle ne se fasse pas de soucis pour lui, il n’en avait pas besoin.

Lentement, il avait retiré ses vêtements avant de l’aider à se mettre au fond du bain. Espérant que l’eau chaude l’aiderait à se réchauffer. Il avait essayé de retirer le sang de ses cheveux, tentant de ne pas lui faire du mal dans son geste, mais c’était peine perdue. Pareil avec son visage. Il avait soudainement l’impression qu’elle était devenue aussi fragile qu’une poupée de porcelaine et qu’il pouvait la briser facilement avec ses mains bourrue et son manque de délicatesse. S’il faisait de la boxe et pas de la danse classique, ce n’était pas un hasard. Elle était désolée. Il ne savait même pas quoi répondre à ça, alors ni ne répondit rien. Haussant simplement les épaules. A elle d’interpréter le geste comme elle voulait. Comprendre qu’il ne savait pas quoi dire, ou simplement penser qu’il lui disait que ce n’était pas grave. De toute façon, il était trop concentré sur ce qu’il faisait pour vraiment réfléchir à ce qu’il pouvait bien répondre à ça. Il regardait son nez, avec la certitude qu’il fallait le remettre en place sinon, il n’allait pas arrêter de pisser le sang avant plusieurs heures. Elle eu un mouvement de recul alors qu’il n’y avait qu’à peine touché, peut-être que le remettre en place, ce n’était pas une bonne idée. Mais elle revint appuyer sa joue contre sa main en lui disant de s’en occuper rapidement. Elle s’accrocha à son bras avant de lui poser une question qui lui fit hausser un sourcil. Est-ce qu’il l’aimerait encore si elle le griffait ? Un mot qui marqua son esprit quelques secondes, avant qu’il revienne à ses affaires, à ce qui comptait vraiment en cet instant. « J’sais pas. Pour l’instant le seul qui m’a déjà griffé c’est Weirdo, le chat de ma fille et je crois que j’l’aime quand même, même s’il est bizarre, d’où son nom. Elle avait dix ans quand on l’a adopté, c’est elle qui a choisi le nom. » Alors qu’il parlait il avait remonté sa main vers le nez de la jeune femme. Qu’elle essaie de se concentrer sur l’histoire de Weirdo le chat, ça pouvait peut-être aider. « Il a toujours l’air complètement à la masse ce chat, genre complètement stone mais des fois, il se réveille d’un coup et il se met à courir partout comme un fou furieux, jte jure … » Un coup sec pour remettre le nez en place. « j’crois qu’il a un problème au ciboulot ce chat. » C’était à peine s’il avait arrêté sa phrase pour agir. Le but étant de toute façon de parler assez pour qu’elle ne sache pas quand est-ce qu’il allait agir. La surprise valait mieux que l’appréhension. « Ça va ? » Assez parlé du chat, il était temps de revenir à Reese et à ses nombreuses blessures. « J’peux remettre un nez en place, une épaule peut-être même faire quelques points à la limite. Mais si y a autre chose de casser, faudrait peut-être aller voir un médecin Reese. » Si elle avait une côte de casser ou une commotion cérébrale ou n’importe quoi d’autre, ça le dépassait complètement. C’était fou comme les os pouvaient devenir fragiles sous les coups à répétition. Il le savait. Il y avait eu un moment où il avait plus d’os fracturés que d’os entiers dans le corps. Aussi délicatement que possible, il appliqua l’éponge contre le visage de la jeune femme pour en essuyer le sang. Il était prêt à faire tout ce qui était en son pouvoir pour l’aider, mais il était flic, pas docteur.
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Reese Jackson
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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptySam 19 Sep - 23:10

– til my heart stops –


Au moins, elle réussit encore à sourire. Minimement, et non sans douleur ; mais elle sourit. La vie ne s’est pas envolée, et elle n’est pas plus basse que terre. Pas psychologiquement ; pas encore. Son corps lui suffit. La faiblesse, ça n’a jamais été son truc. Trop fière, trop indépendante. Une nécessité de prouver qu’elle n’a besoin de rien ni de personne pour vivre, et pour s’en sortir. Mais ce soir, malgré tout ce qu’elle s’échinait toujours à laisser paraître, elle avait éclaté. Sa fierté avait volé en éclats dès l’instant où Wayne avait décroché ce foutu téléphone, dès le moment où elle avait posé ses yeux sur la maison de l’homme. Avant, elle aurait pu faire demi-tour. Rentrer chez elle, si elle ne voulait pas récupérer Evey ; appeler Calvin et s’excuser, prendre la soirée pour essayer de rattraper les dégâts que Tara avaient causé à son visage, à son corps en général. Mais elle s’était sentie glisser, craquer. Elle avait songé, un instant, que dans son état, elle allait être obligée de prendre des jours de congé. Le bar pouvait s’en tirer sans elle, et elle pourrait toujours aider, à un nombre d’heures réduites. Mais son lieutenant, à la caserne, que dirait-il s’il la voyait dans cet état ? Le visage défoncé, ce n’était rien. La hanche était un peu plus embêtante. La douleur à l’épaule aussi. Mais elle aurait pu faire avec. Le supplice qui lui coupait le buste en deux, par contre, elle n’en était pas vraiment certaine. Au moins une côte, qu’elle soit fêlée ou brisée, lui faisait souffrir le martyr. Et elle doutait que ce n’en soit plutôt deux qu’une. Si son boss l’apprenait, elle serait aux arrêts le temps de se remettre. Si le patron du bar la voyait dans cet état, elle serait aux arrêts le temps de ne plus faire peur aux clients, et de pouvoir servir efficacement. Et alors, plus d’argent qui rentre. Plus de ce fric dont elle avait désespérément besoin ; pour Evey, pour vivre sa vie, vivre leur vie. Ça l’avait fait craquer. Instant de faiblesse. Ne pas se retrouver seule avec elle-même pour affronter toutes ces idées douloureuses. Régulièrement le doute l’assaillait, et elle se disait qu’elle aurait mieux fait de ne pas venir. Mais c’était trop tard. Wayne avait vu l’état dans lequel elle était, et il ne la laisserait pas repartir. Pas avant le lendemain. Aucune chance de prendre la fuite ; et même si ladite chance se présentait, serait-elle seulement capable de la saisir et de partir ? Physiquement, son corps en aurait-il été apte ? Et psychologiquement, aurait-elle pu faire ça à Wayne alors qu’il mettait tant de soin et d’application à s’occuper d’elle ?

Non. Non. Ses yeux se perdent dans les siens, et elle sait bien qu’elle ne pourra jamais lui faire ça. Elle est peut-être sauvage et fière, mais elle n’est pas ingrate. Elle n’aurait pas été capable de rentrer chez elle à pied, et il l’aurait attrapée avant qu’elle ne prenne un taxi. Tout ce qu’il voulait, c’était la protéger ; tout ce qu’il voulait, c’était la réparer. Elle était venue ici chercher de l’aide ; pourquoi ne pas le laisser faire ? Et s’abandonner, enfin, dans ses bras. Le laisser voir qu’il avait une bonne raison de continuer à la supporter, le laisser comprendre la confiance qu’elle pouvait lui vouer. Et lui prouver qu’il avait raison de s’acharner, raison de s’ouvrir. Raison de la rattraper, chaque fois qu’elle s’enfuyait.

Tu m’aimeras toujours si j’te griffe de douleur ? Ça n’a pas réfléchi, avant de sortir ça. Une langue engourdie par toute la douleur qui résonne au fond de sa carcasse, et des cordes vocales amoindries par l’étourdissement de son corps. Elle n’a pas réfléchi, elle a parlé. Elle a prononcé un mot qui lui est quasi étranger ; Evey mise à part. Il n’y a personne qui puisse l’aimer, se dit-elle. Personne qui puisse suffisamment s’attacher à elle pour aimer. L’amour, c’est dangereux. Ça détruit plus que ça n’édifie, et ce que ça construit, ça le laisse dans un équilibre si précaire qu’il suffit d’une légère bourrasque pour tout faire tomber. Tout faire s’écrouler, comme un château de cartes qu’on aurait soufflé. L’amour, elle prétend le détester, mais c’est peut-être parce qu’au fond d’elle, elle en a peur. Et le seul amour qui existe vraiment — et qui le mérite ¬¬—, à ses yeux, c’est celui qu’elle a pour Evey.

Alors pourquoi à Wayne ? Pourquoi là ? Elle le regarde dans les yeux, le cœur battant, esquiver le mot comme elle avait esquivé sa petite déclaration à lui, lorsqu’il était venu la récupérer. Elle le fixe, mais lui est occupé par autre chose. Elle sait par quoi, et ses doigts se resserrent doucement sur son bras, sous le coup de l’appréhension. Elle ne s’en rend même pas compte. Une part d’elle a senti les doigts de Wayne remonter vers son nez. Et l’autre se perd dans ses yeux, dans le son rassurant de sa voix. Dans son odeur, juste là. L’histoire de Weirdo le chat, les mots qu’il enchaîne si facilement, et qui lui calment l’esprit. Le cœur, lui, s’emballe. Parce qu’il sait ce qui vient, il sait que tout ça n’est qu’une façade ; Weirdo le chat, sa stupidité, et toute cette histoire dont, au fond, ni l’un ni l’autre n’en a grand-chose à faire.

Et entre deux morceaux de phrases, le choc se fait. Elle tressaille, ses ongles se plantent dans le bras qu’elle n’a pas lâché. Et la phrase est à peine finie qu’elle amène ses deux mains sur son visage, cache son nez. Elle se recroqueville un instant dans la baignoire, silencieusement, se mord la lèvre. Ses pieds ont tapoté un peu le fond en émail, mais elle se calme rapidement. Ferme les yeux. Bascule légèrement la tête en arrière, respire. Ses mains libèrent son visage, se laissent tomber dans l’eau. « Aïe. » Un léger rictus en coin, qui disparaît bien vite lorsque sa lèvre fendue la rappelle à l’ordre. Et elle rouvre les paupières, le regarde comme elle peut. Elle l’écoute, le laisse appliquer doucement l’éponge contre son visage. Elle s’efforce de ne pas réagir, de ne pas chercher à s’enfuir. Elle combat la douleur tant bien que mal, se laissant aller la chaleur qui l’enveloppe. « Si j’ai autre chose de cassé, ce sera des côtes. Et le médecin pourra de toute manière rien y faire. » Elle lève un instant les yeux au ciel, haussant très les épaules. Une douleur légère au niveau de la clavicule gauche la rappelle à l’ordre, et elle essaie de ne pas grimacer. Succès. « J’veux pas aller à l’hôpital. Si j’voulais, j’y serais allée, et si j’savais que t’allais m’y emmener je serais pas venue. » Alors tu vas pas m’y emmener. T’as pas intérêt. « J’te déconseille d’essayer de m’assommer pour me fourrer dans ta voiture et m’emmener me faire soigner. J’m’enfuirai avant. Et j’y arriverai. J’suis pleine de ressources, j’te dis. La grande forme. » Crois-moi. J’suis capable de tout.

Elle renifle. Douloureusement. Ses bras se sont croisés autour de ses genoux, doucement. Elle ne se penche pas trop en avant, ménage ses côtes douloureuses. La question de l’hôpital lui trotte en tête. Elle a peur qu’il essaie de l’y emmener. Peur de voir un médecin, peur du putain de bout de papier que celui-ci lui signera si elle y va. « Si j’avais vraiment eu besoin d’aller à l’hôpital, c’est de là-bas que je t’aurais appelé, pas de devant chez toi. Si c’est pour passer quatre heures assise sur une putain de chaise à attendre qu’un abruti à lunettes blasé d’travailler de nuit vienne s’occuper de moi, pour finalement juste me prescrire des antidouleurs, me mettre des pansements sur la gueule et me prescrire un arrêt de travail, très peu pour moi. » Et elle réalisa, peut-être un peu trop tard, que sa langue était incapable de mentir. La vraie raison pour laquelle elle n’était pas à l’hôpital, c’était ça. Ce foutu arrêt de travail, qui avait trouvé le moyen de s’immiscer quelque part. Elle avait baissé les yeux, regardant partout où elle le pouvait ; sauf Wayne. Fallait enchaîner. Pas laisser ça comme ça. Pas laisser l’occasion de rebondir. « Et puis ils vont vouloir que je fasse une déposition aux flics. Autant sauter la case salle d’attente des bras cassés et aller directement t’ennuyer toi, t’es pas d’accord ? »

Lever les yeux, se perdre à nouveau dans son regard doux. Rictus en coin. Léger, minime. Pas trop douloureux. Elle reprend du poil de la bête, la petite lionne. Elle retrouve son esprit de défi, et son orgueil mal placé. Pas possible de le faire taire. Pas possible de l’oublier. De toute manière, elle a dit ce qu’elle pensait ; et ce qu’elle pensait n’est pas un tort. Ils pourront rien faire de plus pour elle, là-bas ; hormis la faire attendre au milieu de dizaines d’autres bras cassés. Elle aurait fini par s’endormir inconfortablement sur l’épaule de Wayne et rêver de douleur et de coups débridés. Pas d’intérêt. Aucun intérêt. Autant dormir là. Dans un lit. Grossièrement rafistolée. Dans les bras familiers.

« Y a que Weirdo le chat ? J’vais pas avoir réveillé Beth ? » Changer de sujet. Esquiver. Pas rester sur les mots qui pourraient fâcher. Parce que c’est pas ce qu’elle veut. Ce qu’elle veut, c’est Wayne. Pour ça qu’elle est là. Pour ça qu’elle s’est traînée jusqu’ici, tant bien que mal. Pas pour se fâcher. Ça attendra un autre jour. Demain, après-demain peut-être. Mais pas ce soir.

Pour ce soir, elle a assez pris.


(c) elephant song.
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Wayne Hoffman
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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptyDim 20 Sep - 19:50

I know that I'd die without you.
— reese jackson & wayne hoffman —
Come to me In the night hours, I will wait for you And I can’t sleep Cause thoughts devour Thoughts of you consume. I can't help but love you Even though I try not to. I can't help but want you I know that I'd die without you. Stay with me a little longer I will wait for you, Shadows creep And want grows stronger Deeper than the truth. I can’t help but be wrong in the dark Cause I’m overcome in this war of hearts. — war of hearts.

Il l’aimerait toujours même si elle le griffait. Ça ne faisait aucun doute. Il s’était battu pour avoir une chance de pouvoir rester à ses côtés alors, il n’allait pas faire marche arrière pour une broutille pareille. Il était allé chez Reese pour mettre les choses au point, il était resté malgré la mauvaise volonté de la jeune femme, il avait obtenu ce qu’il voulait, alors il n’était pas question de gâcher tout ça pour une griffure. Il l’aimerait toujours si elle le griffait. C’était un mot qui en disait long sur ce qu’il ressentait pour elle. Un mot qui n’avait jamais vraiment franchi le seuil de ses lèvres. Parce que leur histoire était encore trop récentes, leurs réconciliations, encore plus. C’était un petit mot qui pouvait facilement compliqué les choses quand il était prononcé trop tôt. Alors, c’était plus sage de le garder pour lui. Pour l’instant. Il y aurait forcément un moment, dans un futur plus ou moins proche, où il se sentirait prêt à vraiment prononcer le mot. Dans quelques heures, quelques jours, semaines ou mois, il n’e savait rien. Ça viendrait. Il le dirait, parce que c’était ce qu’il ressentait au plus profond de ses tripes. Pas ce soir, pas pour le moment. Là, ce qu’il voulait, c’était seulement faire tout ce qui était en son pouvoir pour faire en sorte que Reese aille mieux. Il n’était pas médecin, encore moins magicien, il ne ferait pas de miracle, c’était certain, mais il ferait ce qu’il pourrait. Même si ça voulait dire raconter la vie de son chat le temps qu’elle pense à autre chose. Une diversion comme une autre pour limiter les dégâts alors qu’il remettait son nez en place. Dans le fond, il s’en fichait de Weirdo et elle aussi. C’était juste le premier sujet de conversation qu’il avait trouvé. Il était pu parler de Beth, il avait beau ne pas avoir été très présent dans la vie de sa fille, il aurait pu trouver quelque chose à raconter et peut-être que ça aurait été plus intéressant. Il aurait pu parler de lui, mais il n’avait rien trouvé d’intéressant à raconter. Sa journée n’avait pas été des plus palpitantes, alors c’était tombé sur Weirdo le chat et son comportement étrange. Un discours sans intérêt qu’il avait coupé pendant quelques fractions de seconde, le temps de faire ce qu’il avait à faire. Un coup sec, rapide et efficace. Douloureux évidemment. Et voir les traits de Reese se déformer sous la douleur c’était difficile. Mais c’était ce à quoi il assistait depuis qu’elle s’était pointée à sa porte. Il aurait préféré que ce ne soit pas son geste à lui qui lui fasse du mal, même s’il faisait ça pour l’aider, il y avait une pointe de culpabilité qui restait en lui. « Désolé. » Ce n’était pas de sa faute dans le fond, c’était bien celle de quelqu’un, mais de qui ? Il n’en avait pas encore la réponse. Lui il ne faisait que l’aider, mais il restait désolé de lui avoir fait mal. Désolé pour elle aussi, parce qu’elle était sans un sale état. Mais être désolé, ça n’allait pas l’aider.

Il ne savait pas ce qui l’aiderait. Il n’était pas médecin, il n’en savait foutrement rien. L’hôpital aurait été une bonne option et il ne se prive pas de le lui dire. Évidemment, c’est une idée qui ne lui plait pas. Il pouvait presque la comprendre, ça lui était arrivé au boulot de se prendre des coups et de refuser de voir un médecin parce qu’il n’avait pas le temps, pas l’envie ou un peu des deux. Mais quand même, s’il avait été dans cet état, y aurait bien eu quelqu’un pour le forcer à aller à l’hôpital. C’était Reese. Impossible de la forcer à faire qu’on que soit. Alors, il soupira avant de lever les yeux au ciel. Il n’était pas d’accord avec elle et maintenant même s’il n’ouvrait pas la bouche, elle devait bien s’en douter. Mais il n’allait pas s’arrêter là. « Il pourrait au moins vérifier si la fameuse côte cassée n’a pas perforer quelque chose. Parait quand même que c’est leur job de soigner les gens. » Autant parler à une sourde de toute façon. Elle n’irait pas à l’hôpital, elle l’avait décidé alors il savait d’avance que lui faire changer d’avis ce serait quasiment impossible, même avec tous les arguments du monde. Il laissa tomber l’éponge avant de se relever du rebord de la baignoire pour aller chercher des serviettes de toilettes qu’il déposa sur le porte-serviette à côté de la baignoire. « Franchement, je crois pas que tu irais bien loin, m’enfin. J’vais pas t’assommer pour t’emmener à l’hôpital. » À quelques pas de la baignoire il croisa les bras sur sa poitrine tout en l’écoutant parler. A ses yeux, son discours n’avait pas de sens. Les médecins auraient forcément pu faire autre chose que de lui filer des antidouleurs. Si ce n’était que pour une histoire d’arrêt de travail, elle était mal partie, elle croyait vraiment qu’on la laisserait monter dans un camion de pompier dans cet état ? A moins d’avoir le teint éclatant dès le lendemain – ce qui semblait impossible – c’était mal parti pour son boulot. « Parce que tu crois vraiment que tu vas pouvoir bosser dans cet état ? J’voudrais pas passer pour le rabat-joie de service, mais t’as même pas l’air d’être capable de sortir les poubelles toute seule là. » Elle était vraiment dans un sale état. Est-ce qu’il fallait qu’il lui emmène un miroir pour qu’elle s’en rende compte ? La douleur aurait du suffire, mais c’était Reese. Tellement têtue, qu’elle serait capable de lui sortir ses poubelles pour lui prouver qu’il se trompait. Manque de chance pour elle, elles étaient déjà sorties depuis un moment déjà. « En tout cas tu passeras pas à côté de la déposition, tu peux en être certaine. » Il n’était pas flic pour rien et puis par déposition, il n’entendait pas uniquement celle bien faite, rédigée dans les règles de l’art au commissariat. Il entendait aussi les explications qu’elle devrait lui apporter à un moment où à un autre. Parce qu’il en demanderait. « Pas d’hôpital. Mais tu restes ici pour la nuit. Et si demain j’estime que c’est nécessaire, je ferais venir mon ex-femme. Ça tombe bien, elle m’a demandé de lui retrouver des bouquins l’autre fois, faut qu’elle passe les prendre. » La rencontre tant redoutée de l’ex-femme et de la nouvelle petite amie. Ça devait forcément venir un jour, impossible qu’elles ne se croisent jamais, après tout, il avait une fille avec Haley. Si ça devait venir demain, ça viendrait demain. « Et j’te demande même pas ton avis alors c’est même pas la peine de râler, j’écouterai pas. » Sur ses mots, il se pencha vers le sol pour ramasser les vêtements ensanglantés de la jeune femme, fallait les nettoyer, quoi qu’il n’était pas sûr qu’on puisse les récupérer. Pour l’instant il se contenta de les déposer dans le lavabo, histoire qu’ils ne trainent plus par terre, mais il s’occuperait de la machine à laver plus tard. Chaque chose en son temps.

« Ouais et encore, j’sais pas où il est fourré. Mais Beth, elle est chez sa mère. » La jeune femme jonglait entre les deux maisons, tantôt ici avec lui, puis après chez sa mère. Elle était majeure, pas besoin d’un tribunal pour décider d’où elle vivrait après le divorce. Elle faisait comme elle le sentait et puis si elle avait envie de revenir ici en plein milieu de la nuit, elle avait les, clefs. Pour l’instant, elle n’était pas là. « Je reviens. » Il quitta la pièce quelques minutes pour monter jusqu’à sa chambre. Il restait encore quelques fringues à Haley et elles faisaient à peu près la même taille alors ça devrait aller. Il redescendit un peu après jusqu’à la salle de bain pour déposer les vêtements pas loin de la baignoire. « Tiens, ça devrait t’aller je pense. » Pas la peine de préciser que ça appartenait à son ex femme, elle devait s’en douter, il n’avait pas une collection de fringue pour fille dans ses propres placards. Au pire, ça pouvait être à Beth aussi, il lui laissait le bénéfice du doute. « J’peux te laisser un peu d’intimité et t’attendre dans le salon, si tu penses pouvoir gérer toute seule. » Elle pensait forcément pouvoir gérer toute seule, la question ne se posait même pas. Il n’irait pas attendre dans le salon de toute façon, plutôt à côté de la porte l’oreille tendue pour être sûr que tout aille bien. Mais il pouvait quitter la salle de bain si elle voulait. Ils étaient peut-être en couple, mais ça n’empêchait pas que des fois, un peu d’intimité, ça pouvait être bien. « Puis peut-être que je pourrais te remettre autre chose en place là-bas. Ici c’est pas facile. » Il espérait qu’il n’ait pas d’autres os à remettre en place, ce n’était pas franchement son truc. « Puis désinfecter les plaies aussi et faire quelque chose pour ton œil et ta lèvre. » Sur ces mots, il attrapa la trousse de secours dans le placard de la salle de bain. Avant de s’approcher de la porte en attendant sa réponse.
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Reese Jackson
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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptyDim 11 Oct - 7:15

– light a fire –


Les médecins, c’était pas son truc. L’hôpital, encore moins. Trop de mauvais souvenirs attachés là-bas. Trop de choses qu’elle aurait préféré pouvoir oublier, ou n’avoir tout simplement jamais traversées. Alors si elle pouvait éviter et laisser la place aux grands blessés dans les urgences, ça l’arrangeait. Bien entendu, l’homme ne l’entendait pas de cette façon ; qui aurait pu l’en blâmer ? Il s’inquiétait, et à juste titre. Elle était dans un sale état. Le genre d’état dans lequel elle ne pensait pas être à nouveau un jour. La gueule cassée, la douleur foudroyante au creux des côtes. Il avait raison de se demander si les blessures n’étaient pas un peu plus conséquentes. Mais quelles que soient ses bonnes intentions, elle ne voudrait rien savoir. Elle ne voulait pas y aller, et elle n’irait pas.

À sa remarque implicite sur sa fierté mal placée, elle ne put retenir un léger sourire. En temps normal, il aurait sûrement écopé d’une moue bougonne, d’un regard de travers. Mais dans l’état où elle était actuellement, elle n’était pas d’humeur à lui faire la tête. Pas d’humeur à faire semblant de lui en vouloir, pour de pareilles broutilles. D’autant plus qu’il avait raison. S’il avait fallu qu’elle lui prouve qu’elle était capable de se débrouiller, elle l’aurait fait. Elle ne semblait plus avoir de limites, dès que l’orgueil était atteint ; et il le savait. Sa moue douloureuse fana quelque peu lorsqu’il mentionna la déposition. Ses doigts abîmés grattèrent doucement sa nuque, que les plaies semblaient avoir épargnée. Elle allait devoir lui expliquer. Elle allait devoir se plaindre, chose qu’elle faisait d’habitude avec tant de bonne volonté qu’il était presque étonnant de voir une réticence quelconque émaner d’elle. « Bien, chef. » C’était une petite voix, un peu piteuse. Elle lâcha un rapide soupir, tentant de se concentrer sur autre chose que sur toutes les douleurs qui la lancinaient de toutes parts. Sur les yeux de Wayne, par exemple. Sur cette légère barbe qu’elle aimait d’ordinaire effleurer du bout des doigts, pour le simple plaisir de la sentir piquer. Elle se laissait aller à des pensées plus douces, lorsqu’il la ramena brusquement à la réalité. Lorsqu’il mentionna l’éventuelle visite d’Haley le lendemain, elle ne put s’empêcher d’avoir une grimace farouche. Elle allait pour répondre lorsqu’il la coupa, lui interdisant de protester, et se relevant. Elle détourna le regard, murée dans son silence, à nouveau remplie de mauvaise volonté, et peu désireuse de continuer sur cette lancée. L’idée de croiser l’ex-femme de Wayne — ou la presque ex-femme, puisque les papiers du divorce ne semblaient toujours pas signés — lui était redoutable. Elle n’avait pas particulièrement peur d’Haley, mais elle ne se voyait pas se tenir face à elle, aux côtés de Wayne. Elle n’était pas prête à admettre qu’elle avait pris cette place, malgré les étreintes tendres et les baisers qu’ils se glissaient parfois. Elle n’était pas encore capable d’avouer le sérieux de ce qu’elle partageait avec l’homme, malgré ce qu’il faisait pour elle ce soir, et chaque jour depuis leur réconciliation. Elle n’y arrivait pas. C’était plus fort qu’elle, il fallait qu’elle voie une faille, qu’elle sente qu’elle n’était pas complètement entichée. Besoin de sa liberté, besoin de se revendiquer indépendante, et certainement pas le besoin d’un homme pour vivre. Mais la vérité, c’était que cette idée n’était ni plus ni moins que de la fierté, et qu’elle le savait ; la vérité, c’était que cette image vacillait un peu plus jour après jour, et qu’elle peinait à en distinguer encore les contours. La stricte vérité, c’était que rencontrer Haley l’aurait probablement fait éclater, et qu’elle n’était pas sûre d’être prête à ça, sans trop savoir pourquoi.

Elle s’était murée dans le silence tandis qu’il était sorti de la salle de bain, après un rapide commentaire sur Beth et sur Weirdo le chat. Le goût à la plaisanterie de la brunette battait de l’aile, et elle prit le temps de renifler et de regarder un peu autour d’elle, pensive. Puis elle se redressa, quelque peu, attrapant le pommeau de douche pour faire couler l’eau chaude, et se rincer encore un peu. Elle peinait à lever le bras droit, aussi dût-elle se servir du gauche. Mais elle parvint à se rincer encore quelques minutes, le temps qu’il ne redescende, des vêtements en main. Elle se doutait qu’il s’agissait de ceux d’Haley, mais elle ne fit pas le moindre commentaire sur le sujet. Pas envie de relancer cet épineux sujet pour le moment. Pas envie de s’aventurer sur des terrains où la fierté serait forcément mal placée. Ç’aurait été bien mal vu pour ce soir. Pour ce soir, et pour Wayne, qui se retrouvait à devoir s’occuper d’elle un peu contre son gré, et qui faisait déjà bien des efforts — qu’elle estimait. « Merci. » Elle le dévisagea quelques instants, avant de hocher la tête, lentement. « Ça devrait aller, t’en fais pas. Si tu t’ennuies, je voudrais bien boire un truc. Un truc chaud. N’importe quoi. » Elle écouta ses derniers mots, l’écoutant calmement revenir à la charge sur les nombreuses contusions qu’elle affichait. Ses doigts effleurèrent un instant sa lèvre, avant qu’elle n’esquisse un très léger sourire en coin. « Hm. Pas de pansement sexy sur la lèvre pour te justifier de pas vouloir m’embrasser, j’te préviens. Je peux survivre avec une coupure. Faudra juste pas trop que tu me fasses rire. » Elle s’efforce de ne pas sourire, déjà. Et elle tente un clin d’œil, de celui qui n’est pas à demi-fermé.

Elle le laisse sortir de la salle de bain et elle se redresse doucement. Sa main abîmée se tend pour attraper une serviette qui traîne. Les propres ne sont pas accessibles, alors tant pis pour celle qui était pendue là. Celle de Wayne indéniablement, puisque Beth avait sa propre petite salle d’eau, dans son souvenir. Elle s’y enroula, restant debout dans la baignoire quelques minutes durant. Malgré la teinte foncée du drap de bain, il devrait sûrement le mettre au sale lorsqu’elle aurait fini de se sécher ; le sang n’allait pas cesser de couler aussi simplement. Au bout d’un certain temps, elle sortit du bain, veillant à ne pas glisser. Elle commença à s’essuyer avec maintes précautions. La douleur se faisait ressentir à chaque mouvement, mais elle ne se plaignit pas. Pas un seul gémissement ne passa la barrière de ses lèvres, et ses jambes tinrent le coup sans même trembler. Lorsqu’elle fut plus ou moins sèche, elle enroula la serviette autour de son corps, s’approchant du grand miroir qui surplombait les lavabos. Elle se détailla quelques instants, approcha son visage de la surface polie. Elle était vraiment dans un état pitoyable. Dès qu’elle sentit sa gorge se serrer et sa vision se brouiller, elle détourna le regard. Elle laissa tomber sa serviette, attrapa les vêtements que Wayne lui avait apportés, et les enfila sans réfléchir. Du linge ample, pile ce qu’il lui fallait pour se sentir un peu mieux. Elle sécha comme elle le put ses cheveux, grimaçant lorsque le tissu entra en contact avec ce qui lui apparaissait être une petite plaie à l’arrière du crâne. Elle s’efforça de ne pas gémir, et de ne rien laisser entendre. Elle ne voulait pas que Wayne débarque, inquiet, en lui demandant si tout allait bien. Elle voulait être au calme, quelques instants. Savourer l’idée de la sécurité, et cette petite pensée qu’on prenait soin d’elle. Que pour une fois, elle n’était pas livrée à elle-même ; qu’elle pouvait se reposer sur quelqu’un d’autre, et ne pas garder la tête haute dans l’unique but de ménager la peine d’Evey. Elle aurait pu complètement se laisser aller. Et si une part d’elle se retenait, l’autre en mourrait d’envie.

Elle laissa la serviette dans le lavabo, avec ses vêtements. Elle fixa quelques instants le tas de linge, pensant à sa fille. Il allait falloir qu’elle téléphone à Cal. Il allait falloir qu’elle le contacte, qu’elle lui dise qu’elle n’allait pas passer récupérer l’enfant. Cette simple pensée la tira de ses rêveries. Elle sortit de la salle de bain sans plus attendre, traînant légèrement des pieds, tentant de rester droite. « J’ai mis la serviette avec mes vêtements, j’pense qu’il va falloir la laver aussi. J’ai pris la tienne, les propres étaient trop loin. Désolée. » Elle ne savait pas si elle l’était vraiment. Mais c’était par principe. Son bras gauche se décolla doucement du long de son corps, et ses doigts se glissèrent sur le pull de Wayne. Elle se cala contre lui, sans un mot, l’espace de quelques secondes. Après quoi elle laissa ses deux mains se faufiler sous le tissu, le lui relever. Ses côtes la firent souffrir mais elle ne moucha pas, aidant le colosse à enlever son vêtement, et se reculant immédiatement pour le prendre et le passer à sa place. « Voilà, comme ça c’est mieux. » Et elle affiche le sourire en coin de la voleuse de pull, tout en ramenant une mèche brune humide derrière son oreille. « Est-ce que j’peux t’emprunter ton téléphone ? Faut que je prévienne la baby-sitter d’Evey que j’vais pas pouvoir venir la récupérer. » Faut que je rassure tout le monde.

Elle plante ses yeux dans les siens, menton relevé, bras serrés contre son torse frêle. Douleur pulsant de chaque millimètre carré de son corps, mais qu’elle tentait tant bien que mal d’oublier. L’espace d’une seconde, elle se demanda comment elle allait pouvoir s’endormir. La nuit blanche semblait de mise, à moins que Wayne n’ait quelque calmant particulièrement efficace à lui donner. Ces pensées s’évadèrent cependant bien vite, tandis qu’elle relevait à nouveau les yeux vers lui. Simple et abîmée.
Admettant pour une fois avoir été rattrapée par la réalité.


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Wayne Hoffman
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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptyDim 18 Oct - 20:28

I know that I'd die without you.
— reese jackson & wayne hoffman —
Come to me In the night hours, I will wait for you And I can’t sleep Cause thoughts devour Thoughts of you consume. I can't help but love you Even though I try not to. I can't help but want you I know that I'd die without you. Stay with me a little longer I will wait for you, Shadows creep And want grows stronger Deeper than the truth. I can’t help but be wrong in the dark Cause I’m overcome in this war of hearts. — war of hearts.

Wayne ne savait pas encore ce qui était arrivé à Reese. Il avait une tonne de questions au bord des lèvres, mais il les retenait. Il les retiendrait aussi longtemps que possible. Mais il allait les poser. Elle le savait très bien. Il n’était pas juste curieux. Il était inquiet pour elle, il ne voulait pas juste savoir pour savoir, il voulait comprendre, il voulait trouver un moyen de l’aider, faire quelque chose pour que ça ne se reproduise pas. Il connaissait la douleur qu’elle était en train de subir, parce qu’il en avait déjà fait les frais à plusieurs reprises. Pas seulement ce jour là avec Jigsaw. Il faisait de la boxe depuis des années et puis il était flic. Il y en avait eu des mecs qui s’étaient défendus alors qu’il les arrêtait. Il savait combien se prendre des coups, ça pouvait faire mal et il n’avait pas envie que Reese ne souffre. Elle n’avait rien d’une pauvre fille sans défense, il le savait très bien. Elle était forte et indépendante, des qualités qu’il avait su apprécier chez elle, mais ça ne l’empêchait pas d’avoir envie de la protéger de faire quelque chose pour éviter qu’elle ne soit blessée de nouveau. Mais pour ça, il fallait qu’il sache ce qui avait bien pu se passer. Il était policier, alors elle n’allait pas échapper à l’interrogatoire, ni même à la déposition, il ferait ce qu’il fallait faire dans le but de la protéger. Et elle avait intérêt d’y mettre de la bonne volonté, parce que c’était chez lui qu’elle s’était pointée, la tronche ensanglantée, alors elle lui devait bien ça. Puis il cédait beaucoup, il s’écrasait pour simplement dire d’accord et passer à autre chose. Alors, elle n’avait plus le choix là, il se fichait bien que l’idée de faire une déposition ne lui plaise pas, cette fois, ce serait à elle d’écouter et de faire ce qu’il voulait faire. Chacun son tour de faire des compromis. Lui, il faisait ce qu’il pouvait pour la soigner, quand bien même il n’était pas médecin et qu’il aurait largement préféré qu’elle se rende à l’hôpital. Alors maintenant, c’était terminé, il avait dépassé son quota de trucs qu’il pouvait accepter en fermant sa gueule. Peut-être qu’elle finirait par regretter d’être venu chez lui, mais il s’en fichait dans le fond. Il voulait juste la protéger et l’aider et ça devait passer par autre chose qu’un bon bain, un nez remis en place, quelques pansements et des fringues propres.

Il était resté dans la salle de main quelques minutes encore. Comme s’il avait peur qu’elle s’évanouisse ou quelque chose dans le genre dès qu’il aurait franchi la porte le menant dans le couloir. Elle voulait un truc chaud, alors il irait lui préparer quelque chose. Il acquiesça avant d’avancer vers la porte de la salle de main. La main sur la poignée, il se retourna légèrement vers la jeune femme. « Tant pis pour ma carrière d’humoriste alors, je vais essayer de garder mes blagues pour moi. » Heureusement, ça en était une de blague. Il n’allait pas se lancer dans une carrière d’humoriste, il était trop nul pour ça. Mais c’était dommage de ne pas faire quelques blagues, par-ci ou par-là, parce que le sourire de Reese, il l’aimait. « P’t’être qu’on devrait essayer le bisou magique pour réparer ça. » Il haussa légèrement les épaules, un sourire sur les lèvres, puis il passa enfin la porte de la salle de bain. Il hésita à rester derrière la porte, pour s’assurer que tout allait bien, mais après une minute voir deux appuyé contre le mur, il laissa échapper un léger soupire avant de partir en direction de la cuisine. Reese irait bien. Elle pouvait sortir de la baignoire et s’habiller sans avoir besoin de son aide. Elle était dans un sale état, mais ça allait aller pour elle. Il avait mit du lait à chauffer, histoire de préparer un chocolat chaud, puisqu’elle voulait quelque chose de chaud, ça devrait faire l’affaire. Lui, il avait besoin de quelque chose pour tenir le coup. Il était revenu dans le salon pour déposer la tasse de chocolat sur un coin de la table basse, là où il n’y avait pas trop de bordel, à côté de son verre de whisky encore plein. Il attrapa le dit verre pour en avaler rapidement le contenu. Le voilà son remontant. Il reposa le verre sur la table avant d’attraper la bouteille, hésitant quelques secondes à remplir de nouveau le verre, mais il jugea qu’il ferait mieux d’être raisonnable. Alors, il rangea la bouteille dans le placard à alcool avant de commencer à ranger le bordel qu’il avait laissé sur le canapé. Les dossiers qu’il avait ramenés chez lui, l’ordinateur sur lequel il avait commencé à taper un rapport et puis la manette qu’il avait balancé dans un coin quelques temps plus tôt. Il mit tout ça dans un coin, par terre, à côté du canapé. Y avait mieux comme méthode de rangement, mais là il n’avait pas le courage de faire mieux. Il se laissa lourdement tomber dans le canapé, retirant ses lunettes de son nez pour les balancer plus loin sur la table avant de se pincer l’arrête du nez dans un nouveau soupire. Les paupières closes, il tâchait de faire le point sur cette soirée.

La voix de Reese dans son dos l’avait sorti de ses pensées. Il se redressa rapidement sur le canapé avant de se relever pour rejoindre la jeune femme. « Pas de soucis, je laverai tout ça. » Il avait l’habitude du sang sur les vêtements de toute façon. C’était qu’ils avaient dû mettre des techniques en place avec Haley pour récupérer les chemises tâchées, plutôt que d’en racheter tous les quatre matins. Il était trop bagarreur, alors les coups, ça parfait vite avec lui. On le lui avait souvent reproché au commissariat. La jeune femme s’était ensuite emparée du pull qu’il portait sur le dos, le laissant en t-shirt, les bras à l’air, mais tant pis, il n’était pas frileux et de toute façon, il ne faisait pas froid, d’après lui, dans cette maison. Elle avait enfilé l’épais pull, qui était bien trop grand pour elle, arrachant un sourire à Wayne. « Au final, ça te va beaucoup mieux à toi. » Il la serra contre lui un court instant avant de déposer un baiser contre son front. Puis, la main passée par-dessus son épaule, il l’emmena avec lui jusqu’au salon, pour rejoindre le canapé sur lequel il s’était efforcé de mettre de l’ordre quelques minutes plus tôt. Il lui tendit ensuite le téléphone, pour qu’elle puisse appeler sa baby-sitter. Il était clair qu’aller chercher Evey ce soir était une mauvaise idée, la pauvre gamine pourrait bien prendre peur en voyant le visage meurtri de sa mère. « Tient. Puis, je t’ai fais un chocolat chaud. Mes talents en cuisine sont carrément limités, mais ça devrait aller quand même. » Il haussa légèrement les épaules. Pour faire un chocolat chaud, ce n’était pas nécessaire d’être un chef étoilé après tout. Heureusement parce que ce n’était pas demain la veille qu’il deviendrait chef cuisinier. Il était très doué pour commander sa bouffe par téléphone, mais pour la préparer lui-même c’était une autre histoire. « T’as besoin de quelque chose d’autre ? » Debout devant le canapé, les bras croisé sur son torse, il regardait Reese, prêt à aller chercher tout ce dont elle aurait besoin, prêt à faire tout ce qui était en son pouvoir pour lui venir en aide.
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Reese Jackson
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MessageSujet: Re: ≈ reached the bottom. (weese)   ≈ reached the bottom. (weese) EmptyMar 3 Nov - 5:50


when the days are cold
and the cards all fold


Elle ne pouvait s’empêcher d’essayer de sourire, malgré la douleur qui lui fendait la lèvre à chaque tentative. Ça durerait encore quelques jours, voire quelques semaines si elle n’en prenait pas soin ; mais elle était bien incapable de cesser d’être ce qu’elle était. Arrêter les grimaces et réfréner les moments d’enthousiasme, ça n’avait jamais été vraiment elle. Même la gueule cassée, elle était capable de continuer à vivre. C’était ce qu’elle avait toujours voulu se prouver. Et c’était ce qu’elle tentait de prouver à Wayne, en parfaite foi de mauvaise volonté ; incapable d’accepter qu’elle avait perdu la partie, et qu’elle n’était, pour ce soir, plus capable de quoi que ce soit.

Elle veut garder la face et elle lui vole son pull, la petite effrontée. Il lui tombe rapidement sur le dos, et aussitôt l’odeur envahit ses narines. Elle le laisse l’attirer vers lui, se blottit un instant contre le torse qu’il lui offre. L’étreinte, même minime, l’aide à se calmer, à disperser ses pensées confuses et la peur de n’avoir inquiété Calvin ou Evey. Elle pense à sa fille, probablement endormie à l’heure qu’il était ; et au O’Reilly qui la gardait patiemment, chez lui, piquant sans doute du nez en attendant que la mère n’arrive. Elle n’avait plus beaucoup de forfait pour appeler, et avait peur d’avoir grillé la toute petite réserve qui lui restait en appelant Wayne. La fin du mois approchait fort heureusement ; mais d’ici là, elle vivait sur le mode de l’économie. Alors, une fois le baiser posé sur le front et le commentaire lui ayant arraché un nouveau sourire douloureux, elle fondit ses yeux dans les siens pour sa petite demande. Un téléphone. Histoire de simplement prévenir sa gardienne improvisée, et de lui dire qu’elle ne passerait chercher Evey que le lendemain. Téléphoner à la caserne, aussi ; profiter de la garde de Bridges pour lui dire qu’il faudrait la remplacer, qu’elle n’était plus capable de faire grand-chose pour les aider. Admettre avoir été foutrement rattrapée par une écrasante réalité, et avoir besoin de se reposer. Il se pouvait qu’elle pète un câble au bout de quelques jours, mais elle savait au fond qu’elle n’aurait pas le choix de rester chez elle — chez elle, ou n’importe où ailleurs qu’à l’un de ses deux boulots. Ses patrons ne voudraient pas qu’elle pointe le bout de son nez quand que tout ça ne serait pas rafistolé. Et ce n’était visiblement pas prêt d’arriver.

« Merci. » Elle l’avait suivi jusqu’au salon, sans protester. Il lui mit le téléphone entre les mains, indiquant par là même le contenu de la tasse qu’elle voyait fumer sur la table basse. Elle releva les yeux vers lui, silencieuse pour quelques secondes, en réponse à la question simple. Avait-elle besoin d’autre chose ? Elle ne savait plus. Elle ne savait pas. Dans l’immédiat, elle n’en avait pas l’impression. Mais sûrement aurait-il fallu qu’elle prenne le temps de fermer les yeux, et de se laisser aller. Sûrement avait-elle besoin d’oublier, l’espace de quelques instants, tout ce qui avait pu lui arriver. Mais c’était peine perdue. Elle savait qu’aussitôt Calvin rassuré et enrôlé de force comme gardien d’enfant jusqu’au lendemain, Wayne voudrait savoir le fin mot de l’histoire ; savoir ce qui lui était arrivé. Elle haussa les épaules, ignorant la petite vague de douleur provoquée par une côte douloureuse. Et son sourire ponctua le geste, alors qu’elle se hissait sur la pointe des pieds pour venir lui arracher un minuscule baiser. « Pas pour l’instant. C’est parfait, merci. » T’es parfait, et je crois que je pourrai jamais assez te remercier, tant pour ta patience que ta générosité. Elle se laissa retomber, pieds au sol, ramenant une mèche brune derrière son oreille. « Je reviens. » Le temps d’appeler, le temps de me débarrasser de ça. Après quoi, elle s’autoriserait enfin le droit à recommencer de respirer.

En quelques pas, elle s’était retirée. Elle retourna dans la salle de bain, fouilla à l’intérieur de la poche de sa veste pour en retirer son téléphone portable. Un petit tour dans le répertoire, et elle put composer le numéro de Calvin sur le combiné que Wayne lui avait si gracieusement prêté. À l’autre bout, ça sonne. Expliquer allait être un calvaire, surtout si elle voulait éviter de l’inquiéter. Et lorsque la voix un peu ensommeillée décroche, elle ne s’entend plus vraiment parler. Les mots sortent, comme si sa bouche voulait s’en débarrasser. Et elle parvient à mettre les choses suffisamment claires pour qu’il accepte de la garder. Il s’inquiète mais elle lui dit que tout va bien. Qu’elle n’est pas seule, et qu’il n’y a pas de souci à se faire. Elle lui dit qu’elle passera demain, et il acquiesce. Qu’elle prenne son temps. Il la déposerait à l’école en partant travailler, si elle n’était pas venue d’ici là. Evey était grande. Evey comprendrait.

Après Calvin, la caserne. Ils décrochèrent et elle put parler avec un responsable. Quelques mots seulement furent nécessaires pour que la situation soit comprise. L’échange fut bref, et elle raccrocha sans s’éterniser. Elle fixa le téléphone, encore quelques secondes après. Comme si l’engin allait lui apporter des réponses qu’elle n’avait pas, lui permettre d’exorciser quelque idée sur laquelle elle ne parvenait à mettre les mots. Et finalement, elle laissa tomber son téléphone portable à côté du lavabo et retourna dans le salon. Elle rendit le combiné fixe à Wayne, les traits un peu plus détendus. Mais pour combien de temps ? « C’est bon, c’est réglé. Merci. » Elle s’assit enfin à ses côtés. Une seconde ou deux, et elle sentit la fatigue s’abattre sur ses épaules. La mauvaise soirée lui remonter en travers de la gorge, et le souvenir de Tara la méprisant comme jamais lui foutre la nausée. Elle ferma un instant les yeux, et sentit la douleur de sa paupière pochée. Elle allait porter les marques de cet affront pendant plusieurs jours, et n’était pas sûre que cette idée la ravissait. C’était comme porter aux nues Tara, et l’humiliation qu’elle lui avait fait subir. Trop pour elle. Mais elle l’avait cherché, dirait-on. Et dans le fond, elle ne pouvait nier.

Elle se pencha, attrapa la tasse de chocolat chaud. Le récipient bouillant lui brûla les mains mais elle ne cilla pas, habituée à bien pire. Elle se contenta de le serrer contre elle, ramenant une manche sur sa paume pour la protéger, puis faisant de même avec l’autre. « J’ai téléphoné à la caserne. Je leur ai dit que je n’allais pas pouvoir venir du reste de la semaine. Et j’appellerai mon patron au bar demain. Satisfait ? » Elle lançait ça comme si c’était lui qui l’y avait contraint. À la vérité, cette petite interrogation en serait presque devenue insultante et injuste, si elle n’avait pas été prononcée avec tant de légèreté. Wayne ne faisait que relever les évidences qu’elle, Reese, avec sa mauvaise foi et son obstination, était incapable d’accepter. Et à ce titre, il pouvait au contraire être fier de ce qu’il pouvait lui faire faire. « Je récupèrerai Evey demain soir à l’école. D’ici là… » Nouveau haussement d’épaules. Elle porte la tasse à ses lèvres, se murant à nouveau dans ses pensées. D’ici là, elle pourrait se reposer.
D’ici là, il lui faudrait parler.

D’ici là, advienne que pourra.
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